Cipa

Déclaration du Comité International pour la Paix, les Droits de l’Homme

et la Démocratie en Algérie (CIPA)

9 novembre 1999

La situation en Algérie requiert toute notre attention. Malgré les controverses légitimes qui ont entouré son élection, le nouveau Président algérien a su interpréter les attentes d’une grande majorité de son pays et de la Communauté Internationale, en s’engageant à faire du rétablissement de la paix et de la concorde civile une priorité de sa politique. Il a également promis de mettre fin aux dysfonctionnements de l’État, aux violations des Droits de l’Homme et à la corruption.

La large participation des Algériens au Référendum du 16 septembre 1999 relatif à la paix et à la concorde civile a montré qu’ils étaient prêts à se mobiliser pour la paix. Cette disponibilité constitue une chance qui doit être saisie rapidement.

Mais le décret sur la concorde civile, limité dans la démarche, son contenu ainsi que son application, ne suffit pas à dénouer la situation complexe que vit l’Algérie, ni même à réduire la violence. Des mesures sont indispensables pour redonner confiance aux algériens, qui ne voient pas venir la fin d’une tragédie qui dure depuis 8 ans.

Il convient donc de mettre fin à l’état d’urgence, de rétablir les libertés publiques, de libérer tous les prisonniers politiques, d’ouvrir la radio et la télévision aux débats démocratiques, de mettre fin aux pratiques policières et de donner suite aux demandes des familles des disparus.

Or, au lieu de s’engager dans cette voie qui, seule, permettrait de donner du crédit aux discours sur la paix, le Chef de l’État algérien menace régulièrement de démissionner si des forces qu’il ne nomme pas l’empêchent d’exercer toutes ses prérogatives.

Alors que des problèmes graves attendent des solutions urgentes dont dépend l’avenir du pays, le Chef de l’État n’arrive pas à former un nouveau gouvernement, plus de 6 mois après son arrivée au pouvoir. L’opacité la plus totale entoure les causes de ce blocage, tandis que le contenu de l’accord avec l’Armée Islamique du Salut reste inconnu. Ces méthodes de gouvernement inquiètent et désorientent les Algériens et plongent leurs partenaires dans l’attentisme.

Le déroulement des événements montre bien que le système politique algérien, s’il reste dominé par le Commandement militaire, est de plus en plus incapable de trouver les solutions susceptibles de sortir le pays de la crise, ce qui justifie les réserves de l’opposition au moment de l’élection. Ce système réduit à néant, comme par le passé, le rôle du président et des institutions, et dénie celui de l’opposition.

Cette situation dramatique rappelle celle déjà connue à la veille du départ du précédent Chef de l’État. Elle ne peut perdurer. D’un système politique militarisé en profondeur, il peut résulter demain un regain de violence dont la population sera la première victime. Le temps perdu dans les luttes de factions porte préjudice à l’Algérie et engage la responsabilité de tous ses gouvernants.

C’est maintenant que les responsables algériens doivent prendre les mesures nécessaires à l’instauration de la paix et de la concorde civile. C’est maintenant que la communauté internationale doit manifester sa solidarité avec le peuple algérien et contribuer ainsi à éviter de nouvelles tragédies.

Premiers signataires:

CIPA: Madjid Bencheikh (Algérie), Mohammed Harbi (Algérie), Anna Bozzo (Italie), Fatiha Talahite (Algérie), Houari Addi (Algérie), Tassadit Yacine (Algérie), Gema Martin Munoz (Espagne), Werner Ruf (Allemagne), Ahmed Othmani (Tunisie), Inga Brandell (Suède), François Gèze (France), Jeanne Kervin (Belgique), Jocelyne Cesari (France), Driss El Yazami (Maroc), Véronique Nahoum-Grappe (France), Kamel Daoud (Algérie), Patrick Baudouin (France), Bernard Ravenel (France), Abdelaziz Bennani (Maroc), Alain Lipietz (député vert européen), Pierre Bourdieu (France), Gian Paolo Calchi Novati (Italie).

Autres signataires:

Alain Lipietz (député vert européen), Salima Mellah (Algérie), Abdelkader Mehrez (ingénieur, Algérie), Brahim Taouti (avocat, Algérie), Sadek Sellam (islamologue, Algérie).

Pour signer, s’adresser à:
Bencheikh Madjid
[email protected]

 

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