AMNESTY INTERNATIONAL COMMUNIQUE DE PRESSE

AMNESTY INTERNATIONAL COMMUNIQUE DE PRESSE

15 mai 2000
ALGERIE: LA PAIX SE CONSTRUIT SUR LA VERITE ET JUSTICE

La délégation d’Amnesty International, qui a visité l’Algérie du 2 au 14
mai, a salué l’amélioration de la situation des droits humains dans le pays
mais a constaté que nombre des préoccupations relatives à la crise des
dernières années demeurent sans réponse.

Au cours de cette visite, la première depuis quatre ans, les délégués
d’Amnesty International ont rencontré des membres du gouvernment, des
organisations de défense des droits humains, des victimes et des familles
de victimes, des avocats et des défenseurs des droits humains, ainsi que
des associations et des groupes actifs dans différents domaines tels la
réhabilitation des victimes de la violence et les droits de la femme.

« Nous avons pu nous déplacer librement dans le pays et nos activités
n’ont été sujettes à aucune restriction », a déclaré Donatella Rovera, l’une
des quatre délégués. « Le niveau de la violence et le nombre des tueries ont
diminué considérablement ; les arrestations arbitraires, les cas de
détention au secret prolongée, de torture, de « disparitions » et de procès
inéquitables ont également diminué de manière significative », a ajouté la
déléguée.

Ces progrès constituent un développement positif mais Amnesty
International demeure toutefois préoccuppée par le fait qu’aucune mesure
concrète et efficace n’ait été prise par les autorités algériennes pour
enquêter et faire la lumière sur les milliers de cas de meurtres,
massacres, « disparitions », enlèvements, torture, exécutions
extra-judiciaires et meurtres intentionnels et arbitraires de civils, qui
ont eu lieu au cours des dernières années – et qui continuent de se
produire, bien qu’à une moindre échelle.

« Amnesty International partage les inquiétudes des victimes et de
leurs familles, celles-ci demandant vérité et justice et refusant
l’impunité. La page ne peut-être tournée comme cela: une paix durable ne
peut se construire au détriment de la vérité et de la justice ni reposer
sur l’impunité, qu’elle soit accordée aux membres des forces de sécurité
ou des groupes armés », a déclaré Roger Clark, le chef de la délégation en
visite en Algérie.

L’ensemble des exactions et violations perpétrées par les membres des
forces de sécurité, de milices para-militaires et des groupes armés comme
le Groupe islamique armé (GIA) et d’autres doivent faire l’objet de manière
urgente d’enquêtes approfondies, impartiales et indépendantes.

« Il est important que de telles enquêtes soient menées le plus tôt
possible, que les résultats soient rendus public et que tous ceux
responsables d’exactions soient traduits en justice », a souligné Roger
Clark, en ajoutant que « la justice doit être rendue et ce, de manière
claire et visible, afin de restaurer la confiance de la population civile ».

L’amnestie accordée par le Président Abdelaziz Bouteflika à un nombre
non divulgué de membres de l’Armée islamique du salut (AIS) et d’autres
groupes, sur la base d’un accord secret, soulève de graves problèmes car
elle permet à des individus responsables de meurtres, de viols et d’autres
crimes de bénéficier de l’impunité.

L’application de la récente loi sur la Concorde Civile soulève
également un certain nombre de problèmes. Cette loi stipule que ceux qui
ont commis des crimes graves comme des meurtres, des viols et des attentats
à la bombe, doivent être traduits en justice. Cependant l’absence
d’enquêtes minutieuses et indépendantes sur les circonstances de ces
incidents signifie qu’il est pratiquement impossible d’établir si les
membres des groupes armés, qui se sont rendus et ont bénéficié de
l’exonération des poursuites selon les termes de cette loi, ont commis de
tels crimes.

Amnesty International a demandé aux autorités algériennes des
informations et des détails sur des cas particuliers et sur des pratiques
de violations des droits humains. L’organisation communiquera ses
observations et recommendations au gouvernment algérien. Suite à cette
visite d’information Amnesty International espère pouvoir se rendre à
nouveau en Algérie dans les prochains mois.

Contexte:
La délégation d’Amnesty International qui s’est rendue en Algérie du 2 au
14 mai 2000 était composée de: Roger Clark, ancien directeur de la Section
canadienne d’Amnesty International et ancien Directeur du Programme Afrique
au Secrétariat international de l’organisation; Donatella Rovera et Philip
Luther, membres du Programme Moyen-Orient et Afrique du Nord au Secrétariat
international d’Amnesty International; et Fateh Azzam, ancien Directeur de
l’organisation palestinienne des droits humains Al Haq et actuellement
responsable du Programme Moyen-Orient de la Fondation Ford au Caire.

Durant leur séjour en Algérie les délégués d’Amnesty International se sont
entretenus avec plusieurs officiels, notamment avec les Ministres de
l’Intérieur, de la Justice et leurs collaborateurs ainsi qu’avec des
haut-fonctionnaires du Ministère des Affaires Etrangères, le Président de
la Cour Suprême, le Président et le Procureur Général de la Cour d’Alger,
les Présidents et membres de Comités de Probation chargés de l’application
de la loi sur la Concorde Civile, le Président et des membres de la
Commission de la Réforme Judiciaire et le Président et des membres de
l’Observatoire national des droits de l’homme (ONDH), institution étatique
des droits humains. Les membres de la délégation se sont également
entretenus avec des organisation non gouvernementales, des avocats et des
militants actifs dans le domaine de la protection et promotion des droits
humains et des libertés, ainsi qu’avec des victimes et des familles de
victimes.

Amnesty International n’avait pas été autorisée à se rendre en Algérie
depuis mai 1996. Entre 1991 et 1996 Amnesty International avait été la
seule organisation des droits humain à visiter l’Algérie chaque année.
D’autres organisations internationales des droits humains (Human Rights
Watch, la Fédération Internationale des Ligues des Droits de l’Homme (FIDH)
et Reporters Sans Frontières) doivent également se rendre en Algérie dans
les prochaines semaines.

Amnesty International document public – AI Index MDE 28/009/2000
– Communiqué de Presse Nr. 89
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Pour plus d’informations veuillez contacter le bureau de presse d’Amnesty
International à Londres, Royaume-Uni, au +44 20 7413 5566