Des Algériens morts dans un naufrage au large de la Turquie

Immigration clandestine

Des Algériens morts dans un naufrage au large de la Turquie

Le Quotidien d’Oran, 5 novembre 2005

Des Algériens sont morts, mercredi, dans le naufrage d’un bateau transportant des émigrés clandestins, au large de la ville balnéaire de Cesme, sur les côtes occidentales de la Turquie alors qu’ils tentaient de rejoindre la Grèce.

Environ trente-six personnes se trouvaient à bord de l’embarcation, selon un communiqué des gardes-côtes turcs repris par l’AFP. Huit seulement, des Palestiniens et des Mauritaniens, ont été secourus vivants. Selon le bilan provisoire des garde-côtes turcs, il y aurait au minimum douze morts. Les douze victimes sont, précise l’AFP, de nationalités mauritanienne, algérienne et palestinienne. Les conditions qui ont conduit à ce drame sont accablantes et mettent, une fois de plus, en relief l’impuissance des émigrés clandestins face à des passeurs impitoyables. Selon le témoignage des huit rescapés, les passeurs et l’équipage ont quitté l’embarcation à bord d’un bateau pneumatique abandonnant les émigrés clandestins à un sort funeste. Le bateau a fini par heurter des récifs et couler. Les garde-côtes turcs poursuivent les recherches en quête d’autres survivants.

 Avec la fermeture de l’Europe et l’instauration du visa Schengen, la Turquie est devenue un point de passage pour des milliers d’émigrés clandestins. L’Office des migrations internationales a estimé le nombre de personnes transitant par la Turquie pour rejoindre la Grèce, à près de 200.000 par an. Il reste que la plupart proviennent des pays de la région ou encore d’Irak, d’Afghanistan ou du Pakistan. L’on ne connaît pas encore le nombre des Algériens présents sur l’embarcation, ni le nombre des décédés. Nous ne savons pas non plus comment ils se sont retrouvés en Turquie.

Le drame prend toutefois une autre dimension parce que les jeunes «harragas» algériens quittent aujourd’hui les chemins habituels de l’immigration clandestine pour d’autres voies, pas forcément sûres. Ils sont de plus en plus nombreux à tenter l’aventure à bord d’embarcations de fortune.

Il y a à peine quinze jours, sept jeunes «harragas» âgés entre vingt-six et vingt-huit ans, ont tenté l’aventure à bord d’une embarcation légère à partir de la plage de Sassel. Ils espéraient rejoindre l’îlot espagnol Capo Gatta.

Trahis par leur embarcation, ils n’ont échappé au drame que grâce à un chalutier qui passait au large de Beni-Saf. Si tous les moyens sont bons pour rejoindre les territoires européens, même celui de se retrouver sous la coupe de réseaux de passeurs spécialisés et dangereux, il est toutefois assez rare pour les clandestins algériens d’utiliser de tels moyens et de «passer» aussi loin de l’Algérie. Ils sont plus habitués à rejoindre l’Espagne, l’Italie, la Grande-Bretagne ou la France soit par des procédés légaux avec des visas authentiques ou «achetés» soit en passant pas les enclaves espagnoles de Ceuta et Melilla, le Maroc ou la Tunisie pour rejoindre, dans ce dernier cas, l’Italie. Ils se sont aussi taillés une «réputation» à leur mesure en embarquant dans les navires étrangers ou algériens qui accostent dans les ports algériens.

Mais la difficulté certaine de se procurer un visa Schengen, ou même territorial, les barricades métalliques autour des enclaves espagnoles ainsi que le drame vécu par les clandestins subsahariens, ces dernières semaines au Maroc, poussent les émigrés clandestins à aller de plus en plus loin ou d’utiliser des procédés aussi dangereux que les embarcations de fortune et les réseaux de passeurs. Parfois, comme le souligne ce nouveau drame, au péril de leur vie.

Samar Smati