Les demandeurs d’asile fuient la crise persistante des droits humains

AI INDEX: MDE 28/007/2003

1 Juin 2003
ALGÉRIE

Les demandeurs d’asile fuient la crise persistante des droits humains

Informations sur la situation des demandeurs d’asile originaires d’Algérie

 

AMNESTY INTERNATIONAL
Index AI : MDE 28/007/2003
DOCUMENT PUBLIC
É FAI

Londres, juin 2003

 

SOMMAIRE
Introduction
Méthodologie
La situation des droits humains en Algérie – observations générales
La protection est toujours justifiée
É vénements récents
Les motifs de protection selon la Convention de 1951
Existe-t-il d’autres possibilités de protection en Algérie ?
Le secteur non gouvernemental
Les personnes qui ne peuvent pas bénéficier de la protection internationale
Les demandeurs d’asile déboutés – formes complémentaires de protection
É volution récente
La Loi sur la concorde civile et l’amnistie présidentielle du 10 janvier 2000
Le service militaire
Les troubles en Kabylie
Les groupes armés
Les réfugiés sahraouis
Conclusion
Quelques publication récentes d’Amnesty International sur l’Algérie
Rapports
Communiqués de presse

Introduction

Le présent document d’information a été remis à l’origine par Amnesty International aux responsables européens chargés de la politique en matière de demandes d’asile, avant la réunion de l’Union européenne sur la situation des droits humains en Algérie qui s’est tenue les 16 et 17 décembre 2002. L’organisation ayant effectué récemment une mission dans ce pays, elle rend ce document public en espérant qu’il sera utile à tous ceux qui sont chargés de l’examen des demandes de protection formulées par des personnes originaires d’Algérie, ainsi qu’à ceux qui soutiennent ces demandes ou les déposent. Seuls quelques changements ont été apportés à l’introduction.

Il a été rédigé pour répondre à des questions spécifiques soumises à Amnesty International par la Commission européenne. Il était destiné aux personnes chargées de statuer sur les demandes d’asile, lesquelles ne sont peut-être pas conscientes de l’ampleur véritable des atteintes persistantes aux droits humains en Algérie, étant donné les difficultés rencontrées pour recueillir des informations dans le pays. Bien qu’il attire l’attention sur un certain nombre de questions, ce document ne prétend en aucun cas être exhaustif.

Depuis 1992, date du début de la crise des droits humains en Algérie, Amnesty International a accordé une très grande importance à son travail de recherche sur ce pays. L’organisation a recueilli des informations sur des cas individuels et elle a dénoncé à maintes reprises les atteintes systématiques aux droits humains commises par les forces de sécurité, des milices armées par l’État et des groupes armés. Jusqu’à la mi-1996, les délégués d’Amnesty International ont effectué régulièrement des missions de recherche dans le pays et se sont entretenus, chaque fois que cela était possible, avec des responsables gouvernementaux. Après avoir envoyé une mission en mai 1996, l’organisation s’est vu refuser l’accès au pays pendant quatre ans malgré ses nombreuses demandes. Les exactions et violations des droits humains ont atteint leur plus haut niveau entre 1996 et 1998.

Amnesty International a pu envoyer une délégation en Algérie en mai et en novembre 2000. Elle a ensuite dû attendre jusqu’au début de 2003. La visite effectuée en février et en mars 2003 a confirmé les principales conclusions du présent document et a permis à l’organisation de mettre à jour ses informations sur la situation des droits humains dans le pays. Amnesty International publiera un nouveau rapport sur l’Algérie à l’automne 2003 dans lequel elle mettra en avant certains de ses principaux sujets de préoccupation. Ce document abordera notamment la persistance du recours à la torture et à la détention secrète, et l’absence de progrès s’agissant de l’impunité (en raison de la réticence généralisée à mener des enquêtes sur les atteintes, présentes ou passées, aux droits humains). Il traitera aussi de la nécessité de traduire en justice les responsables de ces agissements.

Méthodologie

Lorsqu’elle effectue ses recherches, Amnesty International prend soin de ne jamais s’en remettre à une seule source d’informations lorsqu’elle exprime sa préoccupation à propos d’atteintes aux droits humains. L’organisation veille soigneusement à vérifier les informations auprès du plus grand nombre possible de sources. Outre l’envoi de missions de recherche sur le terrain chaque fois que cela est possible, Amnesty International collecte des informations auprès des autorités algériennes, des gouvernements de pays tiers et de leurs représentants, des organisations intergouvernementales et d’autres organisations non gouvernementales (ONG). Elle reçoit également des renseignements émanant d’associations locales de la société civile, entre autres, et d’avocats spécialisés dans la défense des droits humains ainsi que d’autres militants. Les médias nationaux et internationaux et d’autres sources documentaires, dont les sites Internet que l’organisation considère comme fiables, sont également des sources d’informations. Enfin, Amnesty International recueille les témoignages de victimes d’atteintes aux droits humains et de leurs proches.

Vu les règles très rigoureuses de la méthodologie de recherche d’Amnesty International, l’organisation souhaite insister sur le fait que l’absence de référence à des événements particuliers ou à des formes spécifiques d’atteintes aux droits humains dans les documents publiés ne doit jamais être considérée comme permettant, en soi, de conclure qu’un événement donné n’a pas eu lieu ou que certaines formes d’atteinte aux droits humains n’existent pas. Étant donné que les personnes chargées de statuer sur les demandes d’asile doivent accorder le bénéfice du doute aux personnes dont le récit paraît crédible(1), Amnesty International reconnaît que ses rapports ne peuvent faire état de toutes les informations dont elle dispose, et qui peuvent être fiables sans toutefois avoir été vérifiées, ni de chaque événement, ou type d’événement, susceptible d’étayer une demande d’asile crédible.

La situation des droits humains en Algérie – observations générales

En avril 2002, Amnesty International a publié un rapport intitulé Algérie. Quand les gestes symboliques ne sont pas suffisants : les droits humains et l’accord entre l’Union européenne et l’Algérie (MDE 28/007/02). Ce document souligne le fait que le niveau de violence et le nombre de cas d’atteintes aux droits humains signalés restent extrêmement élevés(2). L’organisation faisait observer : «Bien que le gouvernement ait promis en 1999 de tenter de venir à bout de l’héritage d’années de conflit dans le pays, peu de mesures, voire aucune, ont été prises jusqu’à présent pour établir la vérité sur les atteintes massives aux droits humains perpétrées pendant une décennie, ni pour que justice soit faite(3).» Ces observations démontrent que peu de choses ont changé en Algérie, même si Amnesty International a constaté un certain nombre d’avancées, qu’elle a saluées publiquement, dans le rapport de novembre 2000 intitulé Algérie. La vérité et la justice occultées par l’impunité (MDE 28/11/00). L’organisation y faisait observer que le niveau des violences, notamment le nombre d’homicides, avait diminué sensiblement et que les informations faisant état d’arrestations arbitraires, de gardes à vue prolongées, de torture, de «disparitions» et de procès inéquitables avaient également fortement diminué, mais que, malgré tout, la violence restait très élevée.

Ce bilan reste d’actualité. Amnesty International, qui n’a pas constaté d’amélioration sensible en Algérie depuis la période comprise entre 1999 et 2002, estime que la situation des droits humains n’a pas fondamentalement changé dans le pays en dépit de la rhétorique officielle.

Vu la situation des droits humains en Algérie, Amnesty International n’est pas surprise par le nombre important de demandes d’asile qui continuent d’être déposées par des Algériens en Europe, entre autres. Le besoin de protection reste réel et impérieux, bien qu’il soit généralement admis que chaque demande doit faire l’objet d’un examen individuel, cas par cas. L’organisation rappelle que les personnes chargées de la détermination du statut de réfugié ne peuvent pas prendre en considération chaque élément de la demande isolément et que l’ensemble des motifs cumulés invoqués par le demandeur doivent être retenus(4).

Amnesty International n’est pas en mesure de donner une liste exhaustive des catégories de personnes qui, dans le climat politique et relatif aux droits humains qui règne en Algérie, sont toujours vulnérables. Elle n’en demeure pas moins préoccupée pour les personnes ayant des liens réels ou supposés avec des groupes armés, les opposants notoires ou présumés au système politique et les défenseurs des droits humains. À cet égard, Amnesty International fait observer que les proches de ces personnes et leurs amis, quel que soit leur sexe ou leur âge, risquent également d’être victimes d’atteintes à leurs droits fondamentaux.

La protection est toujours justifiée

Au vu de ses recherches, l’organisation est convaincue que de nombreux demandeurs d’asile ont un besoin persistant et justifié de protection, et qu’il faut garder présent à l’esprit qu’une procédure équitable et satisfaisante exige, entre autres, l’examen au cas par cas des motifs invoqués dans la demande d’asile.

Amnesty International déplore qu’un certain nombre d’agents étatiques, parmi lesquels les forces de sécurité et les milices armées par l’État(5), continuent de bafouer les droits humains des civils et des membres des groupes armés. Elle est également préoccupée par les exactions commises par les agents non gouvernementaux, tels ces mêmes groupes armés.

Amnesty International reconnaît qu’il est souvent très difficile d’établir l’identité des responsables de telle ou telle atteinte donnée aux droits humains ou menace. Ceci est particulièrement vrai s’agissant des homicides, car les autorités restreignent l’accès à ce type d’informations ; il est donc souvent impossible d’obtenir des détails précis quant à l’identité des victimes ou aux circonstances exactes de leur mort. L’utilisation répandue, par les agents tant étatiques que non gouvernementaux, de personnel armé en civil rend encore plus compliquée l’identification des auteurs d’homicides.

Événements récents

Lors de l’examen des demandes d’asile formulées par des Algériens, un certain nombre d’événements doivent être retenus comme pouvant motiver le droit à une protection, même s’il ne s’agit pas là d’une liste exhaustive.

La Loi sur la concorde civile, l’amnistie présidentielle du 20 janvier 2000 et le service militaire sont abordés plus loin.

Les récentes dispositions législatives sur la liberté d’expression aggravent les peines encourues pour diffamation envers le président de la République et les institutions étatiques, dont l’armée. Des défenseurs des droits humains ont payé très cher le fait d’avoir parlé au nom des victimes et soulevé des questions sur l’implication de l’État dans des atteintes graves aux droits humains. C’est ainsi que, le 24 février 2002, Mohamed Smaïn, président de la section de Relizane de la Ligue algérienne pour la défense des droits de l’homme (LADDH), a été condamné à un an d’emprisonnement pour diffamation envers un ancien maire et chef local d’une milice armée par l’État, et envers huit de ses compagnons de milice. Ceux-ci avaient accusé Mohamed Smaïn de les associer à tort à l’enlèvement, à la torture, au meurtre et à la «disparition» de dizaines de citoyens dans la wilaya (préfecture) de Relizane, ainsi qu’à l’enfouissement des corps des victimes dans des fosses communes de la région. Pour sa défense, Mohamed Smaïn a indiqué qu’il ne faisait que rapporter les déclarations de dizaines de familles de «disparus», qui auraient vu les miliciens enlever leurs proches.

Il a interjeté appel de sa condamnation et, au moment de la rédaction du présent document, il était en liberté en attendant que la Cour suprême statue sur son cas.

Des modifications au Code pénal introduites en 2001 ont entraîné de nouvelles restrictions au droit à la liberté d’expression. Les peines pour diffamation ont été accrues : la diffamation par écrit, par voie d’illustrations ou en paroles envers le président de la République ou une autre institution comme l’armée, le Parlement ou le pouvoir judiciaire est désormais punie d’une peine pouvant aller jusqu’à un an d’emprisonnement assortie d’une amende de 250000 dinars (environ 3750 euros). Le rédacteur en chef et l’éditeur d’un article ou d’une illustration jugés offensants, ainsi que la publication elle-même, peuvent faire l’objet de poursuites.

Ces modifications législatives ont déjà servi à intimider la presse. C’est ainsi qu’au cours du premier trimestre 2002, à la suite de plaintes formulées par le ministère de la Défense en vertu des nouveaux articles du Code pénal, plusieurs journalistes travaillant pour des quotidiens privés ont été convoqués par la police aux fins d’interrogatoire pour avoir diffamé l’armée par des articles ou des dessins.

Quiconque tenterait de prêcher sans autorisation dans un lieu de prière est désormais passible de sanction, et notamment d’une peine pouvant aller jusqu’à trois ans d’emprisonnement.

Les organisations de défense des droits humains, les syndicats autonomes et les organisations non gouvernementales qui critiquent la politique et les actions du gouvernement ou s’y opposent sont également confrontés à de nombreuses difficultés et restrictions dans leur action. Certaines organisations, comme l’Association des familles de disparus de la province de Constantine, se voient toujours refuser leur enregistrement par les autorités nationales ou locales. En novembre 2001, le Comité des droits économiques, sociaux et culturels des Nations unies a noté avec préoccupation qu’«une autorisation du ministère du travail est requise pour créer tout nouveau syndicat indépendant à côté du syndicat reconnu, l’Union générale des travailleurs algériens (UGTA)(6)».

Des modifications au Code de procédure pénale, introduites en juin 2002, ont fortement allongé la durée légale de la détention provisoire. Les personnes accusées de «crimes qualifiés d’actes terroristes ou subversifs» peuvent être maintenues jusqu’à trente-six mois en détention provisoire, soit deux fois la durée autorisée précédemment. Cette période peut aller jusqu’à soixante mois pour les personnes accusées d’un «crime transnational».

Une centaine de civils non armés, dont des enfants, ont été tués par les forces de sécurité, en 2001 et en 2002, dans le contexte de manifestations antigouvernementales, notamment en Kabylie, une région du nord-est du pays peuplée en majorité de Berbères. La première vague de protestation a eu lieu à la suite de la mort du jeune lycéen Massinissa Guermah dans un poste de gendarmerie, en avril 2001. Les gendarmes auraient tiré sur des manifestants non armés qui se trouvaient à une distance de plus de 100 mètres, et ils en auraient abattu d’autres d’une balle dans le dos après les avoir dispersés avec du gaz lacrymogène. Dans plusieurs cas, des manifestants ont été poursuivis jusque chez eux et abattus à l’intérieur de leur maison. Les forces de sécurité semblent avoir utilisé dans tous les cas des balles réelles. Les manifestants exprimaient leur ressentiment face à la répression politique et à la détérioration de la situation socioéconomique.

De très nombreuses personnes ont été arrêtées, en 2002, pendant des manifestations ou à l’issue de celles-ci, et maintenues en détention pendant plusieurs mois. C’était notamment le cas de plus de 60 militants politiques kabyles, placés en détention sans jugement en mars pour trouble à l’ordre public ; ils ont été remis en liberté conditionnelle en août. Des dizaines d’autres manifestants ont été jugés et condamnés à des peines allant de plusieurs mois à plusieurs années d’emprisonnement. Certains ont été élargis après avoir purgé leur peine, les autres ont recouvré la liberté à la faveur d’une grâce présidentielle décrétée en août.

Amnesty International qui s’est interrogée sur l’émergence de nouveaux groupes terroristes éprouve quelques difficultés à tirer des conclusions concrètes à ce propos. Le fait d’établir si un groupe est nouveau et s’il peut être considéré comme «terroriste» est une question extrêmement complexe, reposant souvent sur des informations peu précises ou incomplètes, et donnant lieu, par conséquent, à des suppositions.

Les dirigeants, la composition et les revendications des groupes armés restent en grande partie inconnus car ces groupes n’ont pas de porte-parole et publient rarement des communiqués. Lorsqu’ils font une déclaration publique, son authenticité ne peut pratiquement jamais être vérifiée. Très peu d’informations sont disponibles sur les communications entre les groupes armés et on annonce souvent la formation de factions dissidentes dont on n’entend plus parler par la suite dans la plupart des cas.

Les motifs de protection selon la Convention de 1951

Un réfugié est une personne qui craint avec raison d’être persécutée du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques(7). Amnesty International a connaissance d’atteintes aux droits humains qui seraient suffisantes pour étayer une demande de protection pour chacun de ces motifs concernant l’Algérie. Il convient, bien sûr, d’examiner chaque cas sur le fond, en prenant en considération tous les éléments de la demande de protection ; il est évident que les motifs se recouvrent souvent partiellement(8).

Les motifs de persécution peuvent être liés non seulement à des activités, opinions ou appartenances en Algérie, mais aussi à des activités politiques, de défense des droits humains ou autres, menées à l’étranger. Tout comportement considéré comme mettant en cause le statu quo social, religieux ou politique est susceptible de provoquer une réaction négative des autorités. C’est notamment le cas pour l’expression de l’homosexualité.

L’homosexualité (9)

L’homosexualité est un sujet tabou en Algérie, comme dans de nombreux autres pays d’Afrique du Nord et du Moyen-Orient. Dans la pratique, en raison de la honte liée à l’homosexualité, peu d’individus révèlent ouvertement leur orientation sexuelle(10). Les homosexuels peuvent être persécutés par les forces de sécurité et par la société en général.

Les relations sexuelles entre personnes de même sexe sont réprimées par l’article 338 du Code pénal. Les actes d’homosexualité sont punis d’un emprisonnement de deux mois à deux ans et d’une amende de 500 à 2000 dinars (entre 7,5 et 30 euros environ). Si l’un des auteurs a moins de dix-huit ans, la peine de l’adulte peut être portée à trois ans d’emprisonnement et à une amende de 10000 dinars (environ 150 euros)(11).

Existe-t-il d’autres possibilités de protection en Algérie ?

L’Algérie est un pays très vaste, mais une bonne partie du territoire est constituée d’un désert inhabitable ou très peu peuplé. La très grande majorité de la population vit le long de la côte au Nord et dans l’arrière-pays. L’autorité de l’État s’exerce sur l’ensemble du territoire. En outre, depuis les modifications législatives de 1992, les policiers sont habilités à intervenir dans tout le pays sans avoir obtenu l’autorisation préalable de la police et des magistrats territorialement compétents. Quant aux agents non gouvernementaux, Amnesty International estime qu’en l’absence d’informations sur la portée de leurs activités en Algérie, il est pratiquement impossible de conclure qu’un groupe particulier n’est pas actif dans une région donnée. L’organisation est consciente du manque surprenant d’informations sur la localisation des agents non gouvernementaux et sur leurs activités et elle ne peut pas conclure qu’un individu qui risque d’être victime d’atteintes graves à ses droits fondamentaux dans une région du pays ne sera pas exposé au même danger ailleurs. Amnesty International met donc fermement en garde contre les conjectures et les vœux pieux laissant à penser que d’autres possibilités de protection pourraient exister à l’intérieur du pays.

Le secteur non gouvernemental

Amnesty International a constaté que les organisations de défense des droits humains, les syndicats autonomes et les organisations non gouvernementales qui critiquent la politique et les actions du gouvernement ou s’y opposent continuent d’être confrontés à de nombreuses difficultés et restrictions dans leur action. Certaines organisations, comme l’Association des familles de disparus de la province de Constantine, se voient toujours refuser leur enregistrement par les autorités nationales ou locales. En novembre 2001, le Comité des droits économiques, sociaux et culturels des Nations unies a noté avec préoccupation qu’«une autorisation du ministère du travail est requise pour créer tout nouveau syndicat indépendant à côté du syndicat reconnu, l’Union générale des travailleurs algériens (UGTA)»(12).

Très peu d’organisations humanitaires ont des activités en Algérie. La plus visible est le Comité international de la Croix-Rouge (CICR), qui est autorisé à se rendre dans le pays depuis 1999. Toutefois, en Algérie, son mandat est strictement limité aux visites des personnes détenues dans les prisons civiles, en dehors des camps de réfugiés de Tindouf gérés par le Front Polisario, dans le sud-ouest du pays.

La surveillance de la situation des droits humains sur le terrain est extrêmement dangereuse et délicate pour les organisations de défense de ces droits, en particulier du fait de l’ampleur des atteintes perpétrées et des risques que les agents de l’État ou les groupes armés peuvent faire courir aux personnes qui les dénoncent. On ne saurait sous-estimer la vulnérabilité du petit nombre d’ONG locales, d’avocats spécialisés dans la défense des droits humains et de militants disposés à prendre de tels risques.

Même dans les quelques cas où la surveillance de la situation des droits humains est possible, elle ne peut de toute façon pas se substituer à la responsabilité de l’État d’accorder sa protection aux individus qui y ont droit, qu’il s’agisse de la protection nationale ou d’une protection internationale de substitution. Amnesty International considère qu’il est donc impossible aux membres de la société civile d’«offrir» une protection en Algérie qui remplacerait la protection internationale à laquelle les individus auraient droit aux termes du droit international relatif aux réfugiés ou aux droits humains(13).

L’organisation estime que la présence ou l’absence de surveillance de la situation des droits humains par des ONG ne doit pas motiver la décision de renvoyer ou non une personne dans son pays d’origine. Les questions qui doivent être prises en considération sont des problèmes généraux liés à la capacité et à la volonté de l’État de respecter et de protéger les droits fondamentaux de ses citoyens, et notamment de ceux qui sollicitent une protection dans un endroit autre que celui où ils résident habituellement. Amnesty International souligne qu’à cet égard, le déplacement à l’intérieur du pays ne peut se substituer à la protection internationale accordée aux réfugiés et que le droit des personnes déplacées à l’intérieur de leur propre pays à une protection doit être compris comme n’excluant nullement le droit de solliciter l’asile(14).

Les personnes qui ne peuvent pas bénéficier de la protection internationale

Amnesty International reconnaît que certains individus originaires d’Algérie ne peuvent bénéficier de la protection internationale aux termes de la Convention relative au statut des réfugiés car ils sont visés à l’article 1F. Toutefois, l’organisation demande qu’une importance soit accordée au principe plus largement applicable de non-refoulement qui relève du droit international coutumier. Dans un pays comme l’Algérie, ceci signifie que des dispositions comme celles de l’article 3 de la Convention contre la torture et de la Convention européenne des droits de l’homme, ainsi que la prohibition de la torture énoncée par le PIDCP, doivent être prises sérieusement en considération. Amnesty International met également en garde contre une approche de l’exclusion aux termes de l’article 1F qui suppose ou impute une «culpabilité par association(15)».

En raison des dangers particuliers courus par les individus, Amnesty International est consciente du nombre limité de cas dans lesquels des membres des services spéciaux des forces de sécurité ont pris le risque de dénoncer des violations des droits humains, et notamment des exécutions extrajudiciaires et des actes de torture, dont ils avaient été témoins ou à propos desquelles ils avaient reçu des informations. Dans tous les cas, ces personnes n’ont osé faire des déclarations publiques qu’après avoir quitté l’Algérie. Toutefois, même lorsqu’elles étaient à l’étranger, elles ont généralement ressenti la nécessité de garder le secret sur leur identité ou le lieu où elles se trouvaient par crainte d’éventuelles représailles des autorités algériennes. Habib Souaïdia, un ancien officier de l’armée, a publié en France, en février 2001, un livre intitulé La sale guerre. C’était la première fois qu’un ancien membre des forces de sécurité faisait le récit détaillé de son expérience et des atteintes aux droits humains dont il avait connaissance en s’identifiant ouvertement comme l’auteur de l’ouvrage. Cette initiative semble avoir donné à plusieurs autres membres des forces de sécurité vivant à l’étranger le courage d’accorder des interviews aux médias et d’apporter des témoignages similaires sur des atteintes graves aux droits humains commises, au cours du conflit, par les forces de sécurité, les milices armées par l’État et les groupes armés.

Les demandeurs d’asile déboutés – formes complémentaires de protection

Amnesty International considère qu’un demandeur d’asile débouté est une personne dont la demande a été rejetée à l’issue d’une procédure équitable et satisfaisante menée correctement et comprenant une procédure d’appel indépendante. L’organisation estime que les normes suivantes doivent être appliquées en cas de renvoi des demandeurs d’asile déboutés dans un pays quel qu’il soit, y compris l’Algérie :

Ces personnes peuvent être renvoyées dans leur pays d’origine lorsqu’il n’existe aucun risque qu’elles soient victimes d’atteintes graves à leurs droits fondamentaux en cas de retour.
Le retour doit se faire dans des conditions de sécurité et de dignité ainsi que dans le respect absolu des droits fondamentaux des demandeurs d’asile déboutés.
Du fait qu’il est complexe et difficile de garantir la pérennité du retour, celui-ci doit se dérouler conformément aux normes relatives aux droits humains et être placé sous le contrôle du HCR(16).

Amnesty International estime que les formes complémentaires de protection doivent être envisagées pour les personnes dont la demande d’asile a été rejetée(17). S’agissant de mineurs non accompagnés, toutes les mesures doivent être prises pour garantir qu’ils bénéficient d’une tutelle indépendante dans le pays où ils sollicitent l’asile, qu’ils peuvent obtenir une assistance juridique, que leur cas est examiné selon une procédure équitable et satisfaisante et que toutes les décisions sont prises dans l’intérêt supérieur de l’enfant(18).

À la connaissance de l’organisation, aucune ONG ne participe à la recherche des proches et, vu les difficultés d’accès à l’information rencontrées en Algérie, on imagine aisément qu’aucune ONG ne pourrait jouer ce rôle. Amnesty International ne dispose d’aucune information faisant état d’une prise en charge par l’État ou par des œuvres de bienfaisance des mineurs non accompagnés renvoyés en Algérie.

Évolution récente

La Loi sur la concorde civile et l’amnistie présidentielle du 10 janvier 2000

La Loi sur la concorde civile (n° 99-08) est entrée en vigueur le 13 juillet 1999 après avoir été votée par le Parlement. Aux termes de cette loi, les membres de groupes armés qui se rendraient dans un délai de six mois (à compter du 13 juillet 1999) et qui n’avaient pas tué, violé, causé une incapacité permanente ni posé de bombes dans des lieux publics bénéficieraient d’une immunité des poursuites. Ceux qui avaient commis de tels crimes seraient condamnés à des peines réduites et bénéficieraient de nouvelles réductions de peine s’ils se livraient aux autorités dans un délai de trois mois. La loi excluait également la peine de mort ou la réclusion à perpétuité pour les membres de groupes armés qui se rendraient dans le délai de six mois, quels que soient les crimes commis(19).

Toutefois, après le 13 janvier 2000, des responsables gouvernementaux, dont le président Bouteflika, ont déclaré publiquement que la porte restait ouverte pour ceux qui souhaitaient renoncer à la lutte armée et réintégrer la société civile. Ceci laissait à penser que les membres de groupes armés qui se rendraient de leur plein gré pourraient encore bénéficier de mesures de clémence non précisées. Toutefois, à la connaissance d’Amnesty International, aucune loi n’a été adoptée à cet effet et les réductions de peine ou exemptions des poursuites qui ont pu être accordées depuis la date butoir l’ont apparemment été d’une manière totalement arbitraire.

Le décret présidentiel n°2000-03 du 10 janvier 2000 a accordé l’exonération des poursuites, sans aucune clause d’exclusion, aux «personnes ayant appartenu à des organisations qui ont volontairement et spontanément décidé de mettre fin aux actes de violence et se sont mises à l’entière disposition de l’État et dont les noms figurent en annexe à l’original du présent décret.» Aucune annexe donnant les noms des bénéficiaires de cette amnistie n’a toutefois été publiée, ni au Journal officiel du 12 janvier 2000 qui contenait le décret, ni ailleurs ; le nombre de personnes ayant bénéficié de cette amnistie et leurs noms n’ont jamais été rendus publics. On estime toutefois qu’un millier de membres de l’Armée islamique du salut (AIS) et de la Ligue islamique pour la Daawa et le Djihad (LIDD) ont bénéficié de l’amnistie présidentielle, à la suite d’un accord secret avec l’armée algérienne.

Les dispositions de l’amnistie présidentielle ainsi que l’application de la Loi sur la concorde civile suscitent toute une série de préoccupations. Amnesty International ne prend pas position sur les grâces accordées une fois la vérité établie et la procédure judiciaire terminée. Toutefois, l’organisation est opposée aux lois d’amnistie et autres mécanismes qui empêchent que la vérité soit révélée et que les responsables présumés d’atteintes aux droits humains aient à rendre compte de leurs actes devant la loi.

Des familles de personnes enlevées et tuées par des membres de groupes armés ont déclaré à Amnesty International et aux médias que les responsables de la mort de leurs proches avaient été amnistiés ou exonérés des poursuites en vertu de la Loi sur la concorde civile. La plupart des associations de victimes des groupes armés ont exprimé la même préoccupation.

Dans certains cas, des individus qui s’étaient rendus dans le cadre de cette loi et qui avaient obtenu des certificats d’exonération ont été arrêtés par la suite et poursuivis pour les crimes dont ils venaient d’être disculpés. De telles pratiques révèlent que des décisions d’exonération des poursuites ont pu être prises sans que les investigations approfondies nécessaires aient été effectuées au préalable. Il est également possible que des individus qui avaient bénéficié de la loi aient été victimes d’atteintes à leurs droits fondamentaux pour d’autres raisons.

Selon des informations parvenues à Amnesty International, des dizaines de personnes qui s’étaient rendues dans le cadre de la Loi sur la concorde civile ont rejoint à nouveau des groupes armés. Il est toutefois impossible de connaître précisément leur nombre.

Le service militaire

À la fin de 1999, le ministère de la Défense a annoncé que les hommes âgés de plus de vingt-sept ans qui n’avaient pas accompli leur service militaire, y compris les sursitaires et les insoumis, verraient leur situation «régularisée». La limite d’âge a été étendue par la suite pour englober tous ceux qui sont nés en 1980 ou avant cette date. Lorsque les autorités annoncent l’examen des dossiers pour une tranche d’âge, les hommes qui déposent une demande voient apparemment leur cas étudié individuellement. La décision de leur accorder un certificat d’exemption du service militaire est prise ultérieurement. Toutefois, les critères retenus pour bénéficier de l’exemption dans le cadre de ce projet n’ont pas été rendus publics et, à la connaissance de l’organisation, les noms des bénéficiaires sont tenus secrets. Il n’est donc pas possible de savoir précisément qui a été ou sera exempté.

Le service militaire, qui dure actuellement dix-huit mois, reste obligatoire pour tous les hommes. L’âge minimum d’incorporation est fixé à dix-neuf ans. À la fin de leur service obligatoire, les conscrits restent pendant cinq ans à la disposition du ministère de la Défense qui peut les rappeler à tout moment. Ils sont ensuite versés dans la réserve pour une durée de vingt ans. Les conscrits qui poursuivent des études peuvent obtenir un report d’incorporation jusqu’à l’âge de vingt-sept ans. L’insoumission en temps de paix est passible d’une peine allant jusqu’à cinq ans d’emprisonnement selon l’article 254 du Code de justice militaire.

Les troubles en Kabylie

Une centaine de civils non armés, dont des enfants, ont été tués par les forces de sécurité, en 2001 et en 2002, lors de manifestations antigouvernementales, notamment en Kabylie, une région du nord-est du pays peuplée en majorité de Berbères. La première vague de protestation a eu lieu à la suite de la mort du jeune lycéen Massinissa Guermah dans un poste de gendarmerie, en avril 2001. Les gendarmes auraient tiré sur des manifestants non armés qui se trouvaient à une distance de plus de 100 mètres et ils en auraient abattu d’autres d’une balle dans le dos après les avoir dispersés avec du gaz lacrymogène. Dans plusieurs cas, des manifestants ont été poursuivis jusque chez eux et abattus à l’intérieur de leur maison. Les forces de sécurité semblent avoir utilisé dans tous les cas des balles réelles, alors qu’aucune vie humaine n’était en danger, et elles n’ont apparemment pas pris les mesures prévues par les normes internationales avant d’avoir recours à la force meurtrière.

La commission d’enquête officielle chargée de faire la lumière sur les événements survenus lors de la première vague de manifestations en avril et en mai 2001 a conclu sans ambiguïté que les forces de sécurité n’avaient pas agi en état de légitime défense, contrairement à ce qu’elles affirmaient. Le gouvernement s’est engagé à sanctionner les gendarmes mis en cause et à traduire les responsables en justice. Le gendarme accusé d’avoir abattu Massinissa Guermah le 18 avril 2001 dans le poste de gendarmerie a été condamné en octobre 2002 par un tribunal militaire à deux ans d’emprisonnement pour homicide involontaire. Toutefois, au moment de la rédaction du présent rapport, aucune procédure judiciaire n’avait apparemment été ouverte contre ceux qui, lors des manifestations, avaient provoqué la mort de plus d’une centaine de civils non armés.

De très nombreuses personnes ont été arrêtées, en 2002, pendant des manifestations ou à l’issue de celles-ci et ont été maintenues en détention pendant plusieurs mois. C’était notamment le cas de plus de 60 militants politiques kabyles, placés en détention sans jugement en mars pour trouble à l’ordre public ; ils ont été remis en liberté conditionnelle en août. Des dizaines d’autres manifestants ont été jugés et condamnés à des peines allant de plusieurs mois à plusieurs années d’emprisonnement. Certains ont été élargis après avoir purgé leur peine, les autres ont recouvré la liberté à la faveur d’une grâce présidentielle décrétée en août.

Les groupes armés

Il est évident que des groupes armés sont toujours actifs en Algérie. C’est notamment le cas du Groupe islamique armé (GIA) également appelé les GIA car il est difficile d’établir dans quelle mesure les groupes armés qui en feraient partie agissent de concert ou collaborent les uns avec les autres, ainsi que du Groupe salafiste de prédication et de combat (GSPC). Ce dernier qui aurait été créé en 1996 par des dissidents du GIA prendrait essentiellement pour cible les membres des forces de sécurité.

Comme indiqué plus haut, les dirigeants et la composition des groupes armés, ainsi que leurs revendications, restent en grande partie inconnus car ces groupes n’ont pas de porte-parole et publient rarement des communiqués(20).
Il ressort de toutes les informations disponibles que le nom de GIA désigne généralement un ensemble peu structuré de groupes de militants islamistes radicaux qui luttent pour imposer leur conception particulière d’une société «islamique», de groupes autonomes de criminels de droit commun dont les agissements ne sont pas dictés par des objectifs politiques ni religieux et de groupes opérant dans le cadre de la criminalité organisée de type mafieux.

Il n’est pas possible de répertorier avec précision les zones dans lesquelles les groupes armés sont actifs, en raison de l’absence de sources d’information indépendantes ou de la nature même de ces groupes. Bien que l’on annonce régulièrement que le GIA et le GSPC concentrent leurs opérations dans certaines régions géographiques définies de manière imprécise, on dispose de peu de renseignements fiables permettant de conclure avec certitude que ces groupes ne peuvent pas ou ne veulent pas mener des opérations ailleurs.

Les membres et les sympathisants du Front islamique du salut (FIS), mouvement interdit, ainsi que leurs proches risquent d’être victimes d’atteintes à leurs droits fondamentaux. On ignore toutefois, dans la plupart des cas, si ces agissements sont perpétrés à leur encontre du fait de leurs liens avec le FIS ou pour d’autres raisons.

C’est ainsi qu’Amnesty International a appris que les forces de sécurité auraient récemment torturé des membres et des sympathisants du FIS, apparemment pour leur extorquer des informations à propos d’un avocat spécialisé dans la défense des droits humains qui vit à l’étranger et qui avait assisté des membres du FIS lorsqu’il exerçait en Algérie.

Les réfugiés sahraouis

Depuis une vingtaine d’années, Amnesty International réunit des informations sur les atteintes aux droits humains commises au Maroc et au Sahara occidental ainsi que dans les camps gérés par le Front Polisario à Tindouf, dans le sud-ouest de l’Algérie(21). L’organisation a adressé de nombreuses recommandations au gouvernement marocain et aux responsables du Front Polisario en les invitant à prendre des mesures pour aborder les sujets de préoccupation persistante relative aux atteintes présentes et passées aux droits humains.

Amnesty International ne prend pas position sur le conflit territorial opposant le Maroc, qui réclame la souveraineté sur le Sahara occidental, et le Front Polisario, qui réclame un État indépendant au Sahara occidental, ni sur les questions liées au référendum sur l’avenir de ce territoire.

Plus de 100000 réfugiés sahraouis vivant dans les camps de Tindouf, dans le sud-ouest de l’Algérie, dépendent de l’aide humanitaire pour leur survie. Ces réfugiés sont privés de leur droit à la liberté de mouvement en Algérie. L’organisation reste préoccupée par les atteintes aux droits humains commises dans ces camps, et notamment par les restrictions au droit à la liberté d’expression et d’association ainsi que par l’impunité dont continuent de bénéficier les auteurs d’atteintes graves aux droits humains perpétrées au cours des années précédentes.

À la connaissance d’Amnesty International, les réfugiés sahraouis ne sont pas autorisés par les autorités algériennes à quitter le camp sans l’autorisation du Front Polisario pour trouver refuge dans d’autres régions de l’Algérie. Les informations parvenues à l’organisation indiquent que les réfugiés qui parviennent à quitter les camps sans autorisation sont souvent arrêtés par l’armée algérienne et remis aux responsables du Front Polisario qui collaborent étroitement avec elle dans le domaine de la sécurité.

Les réfugiés sahraouis qui parviennent à entrer au Maroc, apparemment en passant par le Sud et en traversant la Mauritanie plutôt qu’à partir de l’Algérie, ne bénéficieraient d’une protection que s’ils acceptent de faire allégeance au Maroc, de renoncer à préconiser l’indépendance du Sahara occidental et de dénoncer publiquement dans les médias nationaux les autorités sahraouies et la situation des droits humains dans les camps de Tindouf.

Amnesty International estime que la complexité de la situation des réfugiés sahraouis doit être prise en compte lors de l’examen de leurs demandes d’asile.

Conclusion

Amnesty International souligne que la situation des droits humains en Algérie reste extrêmement instable. Bien que le présent document aborde toute une série de questions que l’organisation souhaite mettre en avant, elle ne constitue pas un inventaire exhaustif de tous les problèmes relatifs à la situation des droits humains qui peuvent être pris en considération dans l’examen d’une demande d’asile individuelle. L’organisation estime donc que les personnes chargées de statuer sur les demandes doivent continuer de prendre très au sérieux celles qui émanent de ressortissants algériens et de réfugiés sahraouis ayant séjourné en Algérie. Le niveau de violence et le nombre de cas d’atteintes aux droits humains signalés en Algérie restent très élevés alors que la capacité et la volonté des autorités algériennes d’accorder leur protection aux victimes est très incertaine.

Quelques publications récentes d’Amnesty International sur l’Algérie

Rapports

· 14/11/2002 Algérie. Cas d’appel sur la torture. Brahim Ladada et Abdelkrim Khider
· 19/4/2002 Algérie. Quand les gestes symboliques ne sont pas suffisants : les droits humains et l’accord entre l’Union européenne et l’Algérie
· 8/11/2000 Algérie. La vérité et la justice occultées par l’impunité
· 1/3/1999. Algérie. La fin du silence sur les «disparitions»
· 1/3/1999. Algérie. Qui sont les «disparus» ? Cas d’appel
· 4/6/1998. Algeria: Medical letter-writing action: « disappearances » of health professionals [Algérie. Action Professionnels de la santé «disparus». Envoi de lettres]
· 16/4/1998. Moyen-Orient et Afrique du Nord. Quand l’État est injuste : procès inéquitables
· 7/4/1998. La Commission des droits de l’homme doit agir maintenant.
· 1/3/1998. Trade Union Action 1998 : Algeria appeal leaflet [Action syndicalistes 1998. Dépliant sur l’Algérie]
· 26/2/1998. Algérie. Programme d’action pour mettre fin à la crise des droits de l’homme. Lettre Ouverte du secrétaire général d’Amnesty International à tous les gouvernements
· 1/12/1997. Algeria: A human rights crisis [Algérie. Une crise des droits humains]
· 18/11/1997. Algérie. Les droits de l’homme en crise. La population civile prise au piège de la violence
· 4/3/1997. Arming the torturers : Electro-shock torture and the spread of stun technology [Les armes des tortionnaires. Matraques électriques et armes paralysantes]
· 19/11/1996. Algérie. Le silence et la peur

Communiqués de presse

· 11/10/2002. Bosnie-Herzégovine. La décision rendue par la Chambre des droits de l’homme dans l’affaire des Algériens doit être appliquée par les autorités bosniaques
· 3/7/2002. Algérie. Les agressions de proches de personnes disparues doivent cesser
· 28/6/2002. Algérie. Le procès d’Habib Souaïdia souligne les préoccupations sur l’absence d’enquêtes
· 5/6/2002. Mission de l’Union européenne en Algérie. Assez de discussions secrètes ! Questions d’Amnesty International à Javier Solana, Josef Pique, Per Stig Muller et Chris Patten
· 24/5/2002. Algérie. Il faut mettre un terme aux tentatives d’intimidation de militants des droits humains
· 19/4/2002. Algérie. Quand les gestes symboliques ne sont pas suffisants : les droits humains et l’accord entre l’Union européenne et l’Algérie
· 17/4/2002. Algérie. Des mesures doivent être prises immédiatement afin qu’aucun autre manifestant ne soit tué
· 26/2/2002. Algérie. Un défenseur des droits humains condamné à un an d’emprisonnement
· 8/2/2002. Algérie. Dix ans d’état d’urgence, dix années d’atteintes graves aux droits humains
· 18/1/2002. Bosnia-Herzegovina: Letter to the US Ambassador regarding six Algerian men [Bosnie-Herzégovine. Lettre à l’ambassadeur des États-Unis au sujet de six Algériens]
· 17/1/2002. Bosnie-Herzégovine. Six Algériens risquent d’être remis aux autorités américaines
· 18/12/2001. Algeria: EU-Algeria Accord: Human Rights clause effectively dead [Algérie. Accord entre l’Union européenne et l’Algérie : la question des droits humains dans une impasse totale]
· 9/11/2001. Algérie. Des proches de personnes «disparues» violemment dispersés
· 21/8/2001. Algérie. Tous les homicides doivent faire l’objet d’une enquête très rapidement
· 21/12/2000. Algérie. Amnesty International condamne les massacres de civils
· 21/11/2000. Algérie. Amnesty International déplore l’immobilisme des autorités face à la situation alarmante des droits humains
· 8/11/2000. Algérie. La vérité et la justice ne doivent pas être occultées par l’impunité
· 15/5/2000. Algérie. La paix doit être bâtie sur la vérité et la justice
· 28/10/1999. Algérie. mise au point sur la scandaleuse désinformation du journal Liberté à l’encontre d’Amnesty International
· 6/7/1999. Algérie. La libération de milliers de prisonniers est une mesure positive
· 23/3/1999. Lettre ouverte aux candidats à l’élection présidentielle en Algérie. Les droits humains doivent constituer l’urgence absolue des candidats
· 3/3/1999. Algérie. La fin du silence sur les «disparitions»
· 31/7/1998. Algeria: UN Human Rights Committee blasts human rights record [Algérie. Le Comité des droits de l’homme critique violemment le bilan en matière de droits humains]
· 21/7/1998. L’Algérie esquive ses responsabilités devant le Comité des Droits de l’Homme
· 24/4/1998. Commission des droits de l’homme. Le maquignonnage politique prend le pas sur la protection des droits humains
· 7/4/1998. Algérie. La Commission des droits de l’homme doit agir maintenant. Déclaration conjointe d’Amnesty International, de la Fédération internationale des droits de l’homme (FIDH), de Human Rights Watch et de Reporters sans frontières

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(1) Voir le Guide des procédures et critères à appliquer pour déterminer le statut de réfugié publié par le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (Guide du HCR), § 196.

(2) Voir Algérie. Quand les gestes symboliques ne sont pas suffisants : les droits humains et l’accord entre l’Union européenne et l’Algérie (index AI : MDE 28/007/02), p. 2.

(3) Ibid., p. 3.

(4) Guide du HCR, § 53.

(5) Dans le contexte algérien, Amnesty International utilise les termes «forces de sécurité» pour désigner les entités appelées Garde communale, Sûreté nationale et Sûreté militaire, ainsi que d’autres organes comme la gendarmerie. L’expression «milices armées par l’État» telle qu’elle est utilisée par l’organisation dans le contexte algérien désigne les entités parfois appelées «GLD» (groupes de légitime défense) et «Patriotes».

(6) Voir Algérie. Quand les gestes symboliques ne sont pas suffisants : les droits humains et l’accord entre l’Union européenne et l’Algérie (index AI : MDE 28/007/02), p. 6.

(7) Article 1A de la Convention de 1951 relative au statut des réfugiés.

(8) Guide du HCR, § 67.

(9) Les homosexuels peuvent être admissibles au statut de réfugié s’ils sont persécutés en raison de leur «appartenance à un certain groupe social». Le HCR estime de manière générale que les «individus victimes d’agressions physiques, de traitements inhumains ou de discrimination grave en raison de leur homosexualité doivent être considérés comme des réfugiés si leur pays ne peut ou ne veut pas les protéger.» Doc. du HCR Protéger les réfugiés : questions et réponses, février 2002. Voir également Principes directeurs en matière de protection internationale : persécution liée à l’appartenance sexuelle dans le contexte de l’article 1-A-2 [de la Convention de Genève de 1951 et/ou du Protocole de 1967 relatifs au statut des réfugiés], HCR/GIP/02/01, 7 mai 2002.

(10) En principe, il faut tenir compte du fait qu’une personne qui ne déclare pas ouvertement son homosexualité risque pourtant d’être victime d’atteintes à ses droits fondamentaux en raison de son orientation sexuelle. Le risque est toujours présent, aussi discret que soit ou que s’efforce d’être un individu. En outre, une personne ne devrait pas être tenue d’assumer la responsabilité de ne pas avoir été «discrète» pour neutraliser la responsabilité de l’État de la protéger contre les atteintes à ses droits fondamentaux. Au contraire, les individus ont le droit d’exprimer librement leur identité sexuelle.

(11) «Tout coupable d’un acte d’homosexualité est puni d’un emprisonnement de deux mois à deux ans et d’une amende de 500 à 2000 DA. Si l’un des auteurs est mineur de dix-huit ans, la peine à l’égard du majeur peut être élevée jusqu’à trois ans d’emprisonnement et 10000 DA d’amende.»

(12) Voir le document d’Amnesty International intitulé Algérie. Quand les gestes symboliques ne sont pas suffisants : les droits humains et l’accord entre l’Union européenne et l’Algérie (MDE 28/007/02).

(13) Voir notamment les dispositions sur le non-refoulement figurant dans la Convention des Nations unies contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, dans le Pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIDCP) et dans la Convention européenne des droits de l’homme.

(14) Voir le principe 2-2 des Principes directeurs des Nations unies relatifs au déplacement de personnes à l’intérieur de leur propre pays. Pour une discussion plus approfondie sur le concept de refuge à l’intérieur du pays et de protection de substitution, voir la table ronde d’experts réunie du 6 au 8 septembre 2001 à San Remo dans le cadre des Consultations mondiales du HCR sur la protection internationale, et notamment la communication du professeur James Hathaway et de Michelle Foster «Internal Protection/Relocation/Flight Alternative as an Aspect of Refugee Status Determination» [Protection interne/réinstallation/autre possibilité de refuge comme aspect à prendre en compte dans la détermination du statut de réfugié].

(15) Voir la table ronde d’experts réunie à Lisbonne les 3 et 4 mai 2001 dans le cadre des Consultations mondiales du HCR sur la protection internationale. D’après le résumé des conclusions sur l’exclusion du statut de réfugié (document EC/G/01/2/Track/1 du 30 mai 2001, § 18, en anglais), l’association ou l’appartenance à un groupe pratiquant la violence ou commettant des atteintes graves aux droits humains n’est pas, en soi, suffisante pour fonder une décision d’exclusion. Toutefois, en fonction de la nature de l’organisation, il est concevable que l’appartenance à une organisation particulière puisse être un motif suffisant justifiant l’exclusion dans certains cas.

(16) Voir le rapport intitulé Afghanistan. Les réfugiés afghans ont toujours besoin de protection et leur retour dans leur pays doit se faire dans le respect des normes internationales (index AI : ASA 11/014/2002).

(17) Pour les normes applicables à l’octroi des formes complémentaires de protection, voir le rapport intitulé Afghanistan. Les réfugiés afghans ont toujours besoin de protection et leur retour dans leur pays doit se faire dans le respect des normes internationales (index AI : ASA 11/014/2002).

(18) Article 3-1 de la Convention relative aux droits de l’enfant.

(19) Pour des détails sur l’amnistie et la Loi sur la concorde civile ainsi que le problème de l’impunité, voir le document publié par Amnesty International en novembre 2000 et intitulé Algérie. La vérité et la justice occultées par l’impunité (MDE 28/011/2000).

(20) Il a déjà été précisé plus haut que lorsqu’ils font une déclaration publique, il est pratiquement impossible d’en vérifier l’authenticité. Très peu d’informations sont disponibles sur les communications entre les groupes armés et on annonce souvent la formation de factions dissidentes dont on n’entend plus parler par la suite, dans la plupart des cas.

(21) Citons parmi les rapports publiés par Amnesty International Morocco/Western Sahara : Freedom of assembly on trial [Maroc/Sahara occidental : La liberté de réunion en procès] (MDE 29/011/2001), novembre 2001 ; Maroc/Sahara occidental : «Tourner la page» : réalisations et obstacles (MDE 29/01/99), juin 1999 ; Maroc/Sahara occidental/ Addendum au rapport «Tourner la page» : réalisations et obstacles (MDE 29/05/99), août 1999 ; Maroc/Sahara occidental. Violations des droits de l’homme au Sahara occidental (MDE 29/04/96), avril 1996 ; Maroc. Les «disparus» ; le mur du silence doit tomber (MDE 29/01/93), avril 1993 ; Maroc. Les arrestations, les «disparitions» et les restrictions à la liberté d’expression et de mouvement n’ont pas cessé au Sahara occidental (MDE 29/03/93), février 1993 ; Maroc. «Disparitions» de personnes originaires du Sahara occidental (MDE 29/17/90), novembre 1990 ; Report of an Amnesty International mission to the Kingdom of Morocco [Compte rendu d’une mission d’Amnesty International au royaume du Maroc], mai 1982.