La tripartite se réunit aujourd’hui: Ce que peut un SMIG

La tripartite se réunit aujourd’hui: Ce que peut un SMIG

par M.Saâdoune, Le Quotidien d’Oran, 2 décembre 1009

Hormis un salaire minimum garanti qui ne risque pas de dépasser la barrière des 15.000 dinars, les participants à la 13ème réunion tripartite – cinq organisations patronales, un seul syndicat et un gouvernement – pourraient, dans les moments d’aparté, décider quels sont les événements majeurs de l’année 2009. Au sein de l’opinion publique algérienne, le choix est déjà fait: la qualification de l’équipe nationale à la phase finale de la Coupe du monde et la grande démonstration de force des syndicats autonomes. Deux événements qui se sont déroulés pratiquement sur la même période et dont les significations sociales sont importantes. Le fait que le gouvernement ait accepté – au coeur de l’extraordinaire effervescence qui a entouré le match – le principe de l’application rétroactive du régime indemnitaire a consacré l’importance du syndicalisme autonome. Il est bien là, très présent, toujours fortement porté par un mouvement ascendant des revendications des fonctionnaires qui cherchent, au moins, un rattrapage sur ceux des pays voisins. Les 3.000 dinars qui seront, dans le meilleur des cas, concédés par le gouvernement sont très loin de permettre ce rattrapage.

Si les situations des pays maghrébins ne sont pas forcément comparables en raison d’une histoire économique différente, leur insertion dans la logique du marché rend inévitable des comparaisons entre les salaires attribués pour les mêmes catégories et fonctions.

Les syndicats autonomes et leurs adhérents s’estiment fondés à établir ces comparaisons avec les pays voisins et ils refusent de considérer que cela relèverait de l’irréalisme. Eux ne comprennent pas que le pays maghrébin le plus riche soit celui où le salaire minimum est le plus bas, 120 euros, contre 178 euros en Tunisie et 164 euros au Maroc.

Certes, le salaire minimum n’est qu’un indicateur, il ne donne pas à voir les inégalités qui existent dans les pays voisins. Cela n’enlève rien à sa pertinence. Il est plus rémunérant d’être professeur d’université au Maroc et en Tunisie qu’en Algérie… Les fonctionnaires algériens sont moins payés que leurs homologues tunisiens ou marocains. Il ne faut pas chercher très loin les raisons d’une combativité jamais démentie chez les fonctionnaires algériens. Se comparer au Maroc et à la Tunisie n’est pas illégitime. Ils peuvent tout autant développer des argumentaires économiques pour le justifier. Les enseignants peuvent faire valoir que l’Etat investit judicieusement en permettant à ceux qui forment la ressource humaine des années à venir à vivre décemment. La grande bataille syndicale menée ces dernières semaines par les syndicats autonomes altère fortement la crédibilité de la tripartite.

Car, ne l’oublions pas, la tripartite, en regroupant les pouvoirs publics, les organisations patronales et syndicales, est normalement un lieu de négociations, parfois âpres, qui débouchent sur un contrat à terme entre les parties. Or, cela a été déjà constaté, l’ostracisme dont sont victimes les syndicats autonomes fait que le « contrat » conclu dans la tripartite ne les engage pas. Et ils ont apporté la preuve que l’engagement de la seule UGTA n’est plus une garantie de « tranquillité » sociale. Le fait que la contestation est portée essentiellement par des syndicats de la fonction publique rend encore plus inexplicable cet ostracisme. Après tout l’Etat employeur de ces fonctionnaires a, comme tout employeur, intérêt à avoir des interlocuteurs viables pour fonctionner au mieux. Le fait que l’administration algérienne, le secteur de l’enseignement et des services publics hospitaliers doivent gagner impérativement en efficacité impose que les acteurs syndicaux crédibles soient reconnus comme des interlocuteurs et des partenaires. Le souci de « contrôle » qui est à la base de la perpétuation d’une représentation unique anachronique n’a pas sa raison d’être. Le pompier UGTA est devenu totalement inefficace. Les faits l’ont montré. Et puis, à trop vouloir contrôler sur la base d’un vrai-faux contrat, on perd en définitive toute prise sur le réel et surtout on perd l’occasion d’avancer et d’améliorer le fonctionnement d’institutions et d’établissements qui en ont grandement besoin.