A la veille de la rencontre maroco-sahraouie

A la veille de la rencontre maroco-sahraouie

Mohammed VI fait diversion

El Watan, 8 novembre 2010

Le souverain marocain a marqué, samedi, le onzième anniversaire de son accession au trône par un discours consacré en partie au conflit du Sahara occidental et à l’Algérie. Ce qui n’est pas nouveau, le contraire aurait d’ailleurs étonné. C’est aussi un discours qui indique ce que sera le nouveau round de pourparlers entre son pays et le Front Polisario, qui se tient aujourd’hui aux Etats-Unis.

Il n’y a donc rien de fondamentalement nouveau, même si les arguments que le roi Mohammed VI croit avancer ont été systématiquement démentis et démontés par l’ONU. C’est effectivement lui qui parlait des «séquestrés de Tindouf», amenant M. Kofi Annan, alors secrétaire général de l’ONU, à dire qu’il s’agit de réfugiés sahraouis et, pour être plus précis, il a souligné que ces personnes ont effectivement trouvé refuge en Algérie, après avoir été contraints de fuir la guerre que leur livre le Maroc. M. Annan avait même souligné, à cet effet, que l’Algérie était un pays d’accueil, comme d’ailleurs le confirment les visites de responsables d’organisations internationales, comme c’était récemment le cas du Haut-commissariat de l’ONU pour les réfugiés (HCR) dont la mission en Algérie avait justement pour but d’évaluer les besoins des réfugiés sahraouis.

De ce point de vue, le statut de l’Algérie n’a pas changé comme le situent les Nations unies, restant «un pays voisin». Ce qui dément catégoriquement les thèses marocaines qui tendaient pendant longtemps à présenter l’Algérie comme partie au conflit. Et c’est le défunt souverain marocain Hassan II qui a cru utile, en juillet 1987, de mettre un terme à cette propagande en déclarant de manière solennelle que le conflit n’opposait pas son pays et l’Algérie. C’est ce qui a permis l’ouverture, juste après, des premières négociations directes entre le Maroc et le Front Polisario, aboutissant sur un accord de paix que l’ONU a alors endossé.
C’est la fameuse résolution 890 dont la mise en œuvre s’est limitée à l’application du seul cessez-le-feu, en septembre 1991. Avant que le Maroc ne revienne sur son engagement, sans pour cela être suivi par l’ONU comme en témoignent les nombreuses résolutions réaffirmant sans la moindre exception ou opposition le droit du peuple sahraoui à l’autodétermination.

Laquelle consiste à choisir entre l’indépendance et le rattachement au Maroc, l’option d’autonomie sous souveraineté marocaine, comme le souligne maladroitement une agence de presse internationale, n’étant en aucun cas envisagée. Malgré, bien entendu, le forcing du Maroc qui avait tenté, dès 2000, de faire modifier les termes de l’équation en évoquant une troisième voie, mais sans succès, la mission des envoyés spéciaux de l’ONU depuis 1997 étant de promouvoir une solution dont la finalité est l’exercice par le peuple sahraoui de son droit à l’autodétermination. Mais le Maroc n’a jamais trouvé d’appui à cette notion de frontières qu’il développe depuis le début des années 2000, les spécialistes soulignant en ce sens que les frontières du royaume telles que reconnues internationalement ne sont en aucun cas menacées.

Reste alors la diversion, en lançant de graves accusations contre l’Algérie, et Rabat a même déclaré de manière officielle qu’il n’y aura pas de normalisation des relations avec l’Algérie sans le règlement du conflit sahraoui, dans le cadre, selon elle, de la souveraineté marocaine.
En fait, faire pression sur l’Algérie pour l’amener à renoncer à son soutien au peuple sahraoui. Malgré les précisions apportées en leur temps par les plus hautes instances internationales, le souverain marocain persiste dans cette voie en déclarant que «l’heure de vérité a sonné pour dévoiler à la communauté internationale les affres de la répression, de l’intimidation, de l’humiliation et des tortures qui sont infligées à nos compatriotes dans les camps de Tindouf».

Comme si le démenti de l’ONU ne suffisait pas, les témoignages se multiplient, cette fois de l’intérieur des territoires occupés pour décrire la situation imposée au peuple sahraoui. Plus que cela, le souverain marocain a compris, lui aussi, que 35 années d’occupation n’ont pas fait des Sahraouis de bons sujets, comme en témoigne le renforcement de l’opposition sahraouie malgré la répression marocaine. C’est aussi son échec.
Mohammed Larbi