Emeutes: Ouyahia accuse les milieux de la contrebande

EMEUTES DE BECHAR ET TAMANRASSET

Ouyahia accuse les milieux de la contrebande

Le Quotidien d’Oran, 23 juillet 2005

Ahmed Ouyahia, secrétaire général du RND, a saisi l’occasion de la réunion du conseil national de son parti, intervenue jeudi et vendredi à l’hôtel Er-Riadh de Sidi Fredj, pour réactualiser ses positons à l’égard d’un certain nombre de questions qui agitent la scène nationale et faire quelques mises au point à ses pairs de l’alliance présidentielle.

Actualité oblige, il commencera sa conférence de presse animée hier à l’issue de la clôture des travaux de la rencontre par l’affaire des deux diplomates algériens enlevés en Irak pour exiger leur libération immédiate et dénoncer vigoureusement l’acte. Il appellera les Algériens à faire preuve de sérénité et ne pas prêter le flanc à la surenchère car, à ses yeux, il y va de l’efficacité du travail des services de l’Etat en charge de faire le nécessaire pour obtenir la libération des deux otages.

S’exprimant sur les émeutes de Béchar et de Tamanrasset, le chef du RND a soupçonné les milieux liés à la contrebande et à la corruption d’en être les instigateurs. Non, parce que tout baigne dans l’huile dans cette partie du pays, mais au vu de certains graffitis badigeonnés sur les murs de la ville de Béchar du style: «nous sommes des Marocains», ou encore l’incendie du siège du Polisario ainsi que les commentaires de certains sites Internet qui évoquent une insurrection généralisée dans le Sud, la main invisible de la manipulation est présente. Il ne s’agit pourtant pas d’être «paranoïaque» mais juste «vigilant» car il ne conçoit pas qu’un Algérien puisse écrire cela. Non sans déplorer les dégâts occasionnés et le recours à la casse alors que des moyens de contestation pacifique existent. Ouyahia estime que les mesures de lutte contre la contrebande et la corruption, initiées depuis quelque temps, sont de nature à déranger des intérêts.

La sortie du secrétaire général du RND retient d’autre part l’attention dans ce qu’elle campe les différences d’appréciation de priorités par rapport à ses pairs de l’alliance présidentielle. Notamment sur la question de la révision constitutionnelle qui fait l’objet d’un débat interne au sein du FLN. «Cette question n’est pas d’actualité», a-t-il dit en se référant à ce qui constitue la priorité dans l’agenda présidentiel. Il fait observer que la préoccupation immédiate pour le chef de l’Etat n’est autre que la réconciliation nationale et qu’il n’a jamais évoqué la révision constitutionnelle même s’il a fait savoir en 1999 que la loi fondamentale n’est pas parfaite en matière de séparation des pouvoirs et la nature du régime politique.

Vis-à-vis du MSP, il s’inscrira en faux contre la proposition des listes communes à présenter aux élections partielles, au motif que le scrutin ne présente pas de danger quelconque pour la République. Ouyahia qui admet que des étincelles jaillissent «de-ci de-là» au sein du triumvirat, a exprimé tout le bien qu’il pense du regroupement qui doit encore gagner en maturité en tant qu’expérience nouvelle dans les moeurs politiques algériennes. L’alliance dont il rappelle qu’elle est liée par un contrat autour de l’exécution du programme présidentiel, a donné, à ses yeux, la mesure de son apport au niveau parlementaire par l’adoption des projets de loi. Elle a aussi le mérite de prouver que des partis peuvent se regrouper en Algérie autour de valeurs communes. Ce qui est, semble-t-il, de bon augure pour l’émancipation de la démocratie. Ahmed Ouyahia qui n’a accepté de répondre qu’en tant que chef de parti, devra, d’autre part, clarifier sa position à l’égard du projet de «la réconciliation nationale et de ses mécanismes». Pas de doute sur le soutien à la démarche dont il rappelle qu’elle constitue l’un des axes majeurs du programme du président. Mais il préfère s’en remettre à ce dernier sur tout ce qui touche à la matérialisation du projet, se distançant ostensiblement de ses alliés.

Au sujet de la loi française du 23 février, le patron du RND a martelé la veille, à l’ouverture des travaux du conseil national: «Nous exigeons d’être respectés. Que le révisionnisme, qui n’est pas acceptable dans d’autres circonstances historiques, ne soit pas de mise quand il s’agit de l’Algérie». Interrogé sur la faisabilité de la signature du traité d’amitié prévue initialement pour la fin de cette année, Ouyahia s’est montré dubitatif. Car, entre l’annonce de l’objectif en 2003 et sa concrétisation, il s’est intercalé cet «événement fâcheux».

Omar Sadki