Etudiants de Zemmouri: «Nous ne sommes pas des terroristes»

LES ÉTUDIANTS DE LA CITÉ UNIVERSITAIRE DE ZEMMOURI MARCHENT CONTRE LA RÉPRESSION

«Nous ne sommes pas des terroristes»

Le Soir d’Algérie, 25 avril 2010

Scandant des slogans hostiles au pouvoir et exhibant des cartes d’étudiant, une centaine d’étudiants de la cité universitaire de Zemmouri a sillonné, hier matin, la ville du chef-lieu de wilaya de Boumerdès pour dénoncer la répression qui s’est abattue sur les jeunes manifestants et la communauté estudiantine de cette ville qui vit des émeutes depuis la mort du jeune B. Hamza, tué par balle par un policier.
«Nous ne sommes pas des terroristes !» «Pouvoir assassin !» «Ulach smah ulach !». Tels ont été quelquesuns des slogans scandés par la foule en ville, face aux forces dépêchées pour protéger l’entrée officielle du siège de la wilaya. «En tant que résidents de la cité universitaire, nous sommes sous la responsabilité de l’Etat, et ce sont ses agents (les policiers anti-émeutes ndlr) qui nous ont agressés !» fulminera un marcheur. Les étudiants montraient du doigt les CRS qui, selon eux, ont mené une répression féroce contre les émeutiers de Zemmouri, commettant des dépassements. «Ils ont violé la franchise universitaire et nous ont agressés», disaient unanimement les marcheurs. Youba nous montre sa blessure au visage. «J’ai été victime d’un tir de grenade lacrymogène», assure-t-il. Ali affirme, quant à lui, qu’il a été tabassé lorsqu’il est sorti de la mosquée de la ville. Tous disent, par ailleurs, que les policiers ont lancé des pierres sur les étudiants, en atteignant certains. Ils précisent, toutefois, que les policiers ne sont pas entrés dans la cour de la cité, mais qu’ils lançaient leurs grenades et leurs pierres depuis le seuil de l’entrée de la cité universitaire. Les marcheurs affirment, en outre, que seize de leurs camarades ont été blessés. Ils nous ont montré les restes des grenades lacrymogènes qui indiquaient clairement l’année de péremption : 2008 «Voilà la preuve ! On nous bombarde avec du gaz devenu dangereux !» clamaient-ils Devant l’entrée du siège de la wilaya, les marcheurs ont observé un sit-in, entonnant leurs slogans contre le pouvoir. Ils exigeaient la venue du wali pour lui faire part de ces dépassements. «Nous sommes à l’écoute», nous affirmera le chef de cabinet, à la question de savoir ce que compte faire la wilaya après ces regrettables événements. A noter que les abus des policiers dénoncés par les étudiants ont été confirmés par plusieurs émeutiers de Zemmouri où la situation était, hier en milieu de journée, très précaire.

Situation tendue
Au niveau de la cité Sider à l’entrée ouest de Zemmouri, la situation était très tendue. La vingtaine de jeunes qui nous a très vite entourés en avait gros sur le cœur. Quelques interventions méritent une certaine attention : «Les policiers nous taxent tous de terroristes. Ils justifient ainsi leurs dépassements. Ils nous humilient dans la rue et dans les cafés !» ; «Nous en avons plus qu’assez d’être étiquetés comme terroristes alors que nous sommes leurs victimes.» ; «Il y a trop de victimes de terroristes, pour en rajouter par la police.» Pour preuve, ce groupe nous a cité plusieurs cas où les jeunes de la localité ont restitué des armes abandonnées par des policiers victimes d’actes terroristes. Le dernier cas date de jeudi dernier. Un jeune avait trouvé, dans la rue, un PA et l’a remis aux services de sécurité. Et ce groupe de jeunes de dresser un état de la situation prévalant dans leur commune : «Aucun projet n’est attribué à la commune à cause de la réputation qu’on lui colle. La plus grande partie des jeunes est au chômage. Des camions chargés de sable et de tuf par ceux qui pillent nos plages et saccagent nos montagnes passent matin et soir par la ville sans être inquiétés. Et il suffit que la tête d’un jeune ne “revienne” pas un policier pour qu’il se retrouve menotté et conduit au commissariat !» Nos interlocuteurs jurent qu’ils n’arrêteront pas de manifester tant que leurs amis n’auront pas été libérés. «Des jeunes qui ne faisaient que passer ont été arrêtés hier», assurent-ils. Pour eux, les dépassements des forces chargées du maintien de l’ordre sont trop nombreux pour être passés sous silence. Ces jeunes nous ont affirmé qu’il y a eu des blessés et des arrestations, mais sans en préciser le nombre. A noter que les manifestations se sont poursuivies vendredi jusqu’à une heure tardive de la nuit.
Abachi L.