Avancée des djihadiste au Mali : Paris va « répondre », Alger, Tunis et Tripoli se concertent

Avancée des djihadiste au Mali : Paris va « répondre », Alger, Tunis et Tripoli se concertent

Oussama Nadjib, Maghreb Emergent, 11 Janvier 2013

La situation au Mali connaît une brusque accélération avec le mouvement des djihadistes en direction du sud qui semble faiblement combattu par les forces régulières. Bamako a lancé un appel à l’aide militaire de la France qui va « répondre  » dans le cadre des résolutions du Conseil de sécurité. Lequel a appelé à soutenir les forces maliennes. Les Premiers Ministres de Libye, Tunisie et d’Algérie se rencontrent samedi à Ghadamès pour parler de «sécurité des frontières ». La marche vers la guerre s’accélère au Mali.

Le chef d’état-major de l’armée malienne a beau avoir affirmé que les troupes étaient prêtes, les évènements de ces dernières heures le démentent. La demande d’aide militaire faite par le président malien par intérim Dioncounda Traoré à la France aussi. L’aide en question semble avoir déjà commencé puisque des avions militaires transportant des armes et des soldats étrangers sont arrivés jeudi à Sévaré (centre du Mali), non loin de la localité de Konna, qui avait été prise dans la matinée du jeudi par les islamistes. Un site malien citant des « sources militaires » affirme vendredi que l’armée malienne «a repris le contrôle de Konna, en neutralisant tous les jihadistes ».

Aucun détail n’est fourni sur cette «reprise », ni si elle s’est faite avec l’apport des forces étrangères arrivées jeudi et dont on ne connait ni le nombre, ni la provenance. Des témoins travaillant à l’aéroport de Sévaré ont relevé la présence de «blancs » parmi les soldats. « J’ai vu atterrir des cargos C-160 Ils ont débarqué des armes et des hommes. Certains hommes avaient la peau blanche », a indiqué l’un d’eux à l’AFP. Les affrontements entre l’armée malienne et les djihadistes ont repris ces derniers jours après neuf mois d’une sorte d’armistice non déclarée. Les militaires maliens ont peu résisté à Konna et ont choisi de se replier, ce qui donne une idée de la fragilité de l’armée malienne. «C’est la débandade totale ici » a indiqué un habitant de Konna. L’information sur la reprise de Konna donnée ce vendredi par le site Mali-Actu reste à vérifier.

Que cherchent les islamistes ?

Les intentions des djihadistes, estimés à 1200 hommes équipés de véhicules tout-terrain ne sont pas claires. S’agit-il pour Ançar Eddine qui semble diriger l’offensive de peser sur les négociations prévues jeudi mais qui ont été reportées de deux semaines ? Ou alors tentent-ils, en contournant Mpoti, qui est la place forte de l’armée malienne le plus au nord, d’aller plus au sud afin de créer une situation de nature à entraver l’arrivée de la force africaine de 3300 hommes de la Cédéao.

Le conseil de sécurité de l’Onu réuni jeudi a adopté une déclaration appelant à un « déploiement rapide » de la force internationale au Mali devant la « grave détérioration de la situation » sur le terrain. Il a appelé les Etats membres « à aider les forces de défense et de sécurité maliennes à réduire la menace représentée par les organisations terroristes et les groupes affiliés » qui contrôlent le nord du pays. Susan Rice, ambassadrice américaine à l’Onu a indiqué que la lettre du président malien Traoré à François Hollande «disait en résumé : « au secours la France » ». Elle a d’emblée approuvé une éventuelle intervention française : il y a eu au sein du Conseil un « consensus clair sur la gravité de la situation et le droit des autorités maliennes de rechercher toute l’assistance possible », a-t-elle ajouté.

Paris en première ligne

Le président François Hollande a déclaré vendredi que « la France répondra (…) « strictement dans le cadre des résolutions du Conseil de sécurité de l’ONU », à la demande d’aide militaire des autorités maliennes face aux groupes islamistes armés. «Je le dis devant vous, nous sommes devant une agression caractérisée qui met en cause l’existence même du Mali », a affirmé le chef de l’Etat français lors de ses vœux au corps diplomatique. La France risque, contrairement aux affirmations de Laurent Fabius, de se retrouver en «première ligne ». En parlant de réponse dans le cadre des résolutions du Conseil de sécurité, le président français fait clairement à l’appel lancé jeudi par l’instance onusienne aux Etats membres afin qu’ils aident «les forces de défense et de sécurité maliennes à réduire la menace représentée par les organisations terroristes et les groupes affiliés » qui contrôlent le nord du pays. La résolution demande un déploiement rapide de la Mission internationale de soutien au Mali sous conduite africaine (MISMA)’’.

Les aspects politiques paraissent relégués au second plan même si le Conseil de sécurité ‘’appelle à la mise en place immédiate d’une feuille de route politique convenue, qui inclut des négociations sérieuses avec les Maliens non-extrémistes du nord et presse pour le plein rétablissement de la gouvernance démocratique’’. La formule «maliens non-extrémistes » semble mettre Ançar Eddine hors du champ des négociations.

Réunion d’urgence à Ghadamès entre maghrébins

La question sera probablement examinée dimanche à Alger où le Premier Ministre malien est attendu pour discuter de la situation au nord du Mali. Le Premier ministre malien Diango Cissiko sera accompagné des ministres de la Défense, de l’Administration territoriale et de l’Aménagement du territoire, de l’Equipement et des Transports et de hauts responsables civils et militaires, indique un communiqué officiel à Alger.

« Les deux parties examineront, dans ce contexte, les voies et moyens de renforcement de la coopération entre les pays du champ et les partenaires extrarégionaux pour éradiquer le terrorisme et le crime organisé qui constituent une menace pour la stabilité et la sécurité dans la région du Sahel », ajoute la même source . Samedi, les premiers ministres d’Algérie, de Libye et de Tunisie se rencontrent à Ghadamès pour discuter de la sécurité des frontières. Un signe que la marche vers la guerre s’est accélérée au Mali.