Journée sanglante pour les Palestiniens et état d’urgence au Yémen

L’escalade militaire israélienne s’intensifie

Journée sanglante pour les Palestiniens

El Watan, 24 mars 2011

Avec 8 morts, dont 4 membres d’une même famille et plus de 20 blessés, la journée de mardi fut la plus sanglante depuis plus de deux ans dans la bande de Ghaza. Des milliers de citoyens ont accompagné, hier, les victimes, dont 3 enfants, à leur dernière demeure. L’escalade militaire israélienne, qui a commencé samedi passé, augmente de jour en jour.

Palestine. De notre correspondant

Après une série de raids aériens dans la nuit de lundi à mardi, contre des sites situés dans plusieurs quartiers de la ville de Ghaza, et Khan Younes au sud de l’enclave palestinienne, faisant 17 blessés dont 7 enfants et 6 femmes, en plus des dégâts matériels et de la frayeur causée aux civils, habitant près des cibles bombardées, l’armée israélienne a enchaîné le lendemain par l’assassinat pur et simple de 4 civils dans le quartier Chedjaayia, à l’est de la ville de Ghaza. Les victimes, 3 enfants et un quinquagénaire de la famille Al Helou, ont été touchées, mardi, en début d’après-midi, par des éclats d’obus d’artillerie qui ont touché leur maison. Le bombardement a également fait 12 blessés dont 4 enfants.
Chedjaayia, dont les limites a l’est sont très poches du territoire israélien, est connu pour être l’un des quartiers de la ville de Ghaza où la densité de population est la plus forte. En début de soirée, ce sont 4 militants des Sarayas Al Qods, la branche armée du Djihad islamique qui sont tombés après avoir été directement touchés par des éclats de roquettes air sol, lancées par un drone israélien (avion espion sans pilote).

L’attaque a eu lieu dans le quartier Ezeitoun au sud-est de la ville de Ghaza. Le drone, doté d’une grande précision, n’a laissé aucune chance à ces jeunes combattants dont les corps déchiquetés et calcinés ont été transportés à l’hôpital Al Shiffa. En fin de soirée, toujours dans le quartier Ezeitoun, deux autres combattants du Djihad islamique, la deuxième grande faction islamiste dans les territoires palestiniens après le mouvement Hamas, ont été touchés dans un autre raid aérien. Des sources hospitalières ont indiqué que les blessures de l’un d’entre eux sont graves. Des responsables du Djihad islamique ont promis, dès mardi soir, de répondre aux crimes israéliens. Hier, tôt le matin, deux missiles de type Grad, ont atteint la ville israélienne de Beersheva, dans le désert du Neguev distante de 40 km de la bande de Ghaza. Les missiles ont fait un blessé et quelques dégâts matériels.

Les institutions éducatives de la ville sont restées fermées et le maire a demandé à son gouvernement d’entreprendre des mesures dures contre le mouvement Hamas qui contrôle la bande de Ghaza. Un autre missile de type Grad a atterri près de la ville d’Ashquelon, sur le littoral israélien, à près de 30 km de l’enclave palestinienne sans occasionner de victimes. «Il s’agit d’une première réponse aux crimes sionistes commis contre notre peuple dans la bande de Ghaza», a affirmé le Djihad islamique dans un communiqué. Le cabinet israélien restreint s’est réuni, hier, pour discuter des mesures à entreprendre après les tirs de missiles Grad, les premiers depuis la fin de l’opération militaire israélienne d’envergure dénommée «Plomb durci», qui a duré du 27 décembre 2008 au 18 janvier 2009. Plus de 1400 Palestiniens, en majorité des civils ont été tués par l’armée israélienne et plus de 5000 autres ont été blessés dans ce qui fut l’agression israélienne la plus meurtrière contre la bande de Ghaza depuis le début du conflit israélo-palestinien.

Le vice-Premier ministre israélien, Sylvain Shalom, a déclaré juste avant la tenue de la réunion du cabinet israélien restreint qu’en cas de poursuite des tirs de missiles contre le territoire israélien, il n y aura pas moyen d’éviter une opération militaire d’envergure contre la bande de Ghaza, dans le but de faire tomber le Hamas. Le mouvement Fatah et l’Autorité palestinienne ont vivement dénoncé les crimes israéliens commis à Ghaza. Nabil Shaath, membre du comité central du Fatah, a appelé le mouvement Hamas à répondre a l’escalade israélienne en œuvrant sincèrement et rapidement pour la réalisation de la réconciliation. «L’acceptation par le mouvement Hamas de l’initiative du président Mahmoud Abbas qui consiste en la visite de la bande de Ghaza et la formation d’un gouvernement d’union nationale est la réponse adéquate à l’agression militaire israélienne» a dit Shaath.

L’escalade militaire israélienne contre la bande de Ghaza est survenue après l’annonce par le président Mahmoud Abbas de son intention de se diriger vers la bande de Ghaza pour former un gouvernement d’union nationale dont le but essentiel est l’organisation d’élections législatives et présidentielles. Benyamin Netanyahou, le Premier ministre israélien, qui tient à préserver la division dans les rangs palestiniens, a de sa part demandé au président Abbas de choisir entre la paix avec le Hamas ou la paix avec Israël.

Fares Chahine


Le Parlement yéménite vote l’état d’urgence

Le président Saleh abat ses dernières cartes

Le Parlement yéménite a approuvé hier l’instauration de l’état d’urgence, rapporte l’AFP. Un vote rejeté par l’opposition. En outre, le président Ali Abdallah Saleh a appelé le même jour à un dialogue direct avec les jeunes. Ces derniers ont, à leur tour, rejeté cette proposition et continuent à exiger son départ depuis plus d’un mois.

Un député du parti islamiste Al Islah, Abdel Razaq Al Hejri, a qualifié ce vote d’«une falsification éhontée». Il a affirmé que le quorum n’a pas été réuni, car 133 députés seulement sur 301 ont assisté à la séance.
De son côté, le chef du bloc du Parti socialiste yémenite, Aïdarous Al Naqib, a indiqué que «le pouvoir ne pourra pas appliquer la loi sur l’état d’urgence, car il faudrait pour cela tuer dix millions de Yéménites».

En l’absence d’une loi définissant clairement ce que signifie l’état d’urgence, le dictateur de Sanaa peut interpréter une telle option à son profit avec tous les dérapages qui peuvent en découler. Le parti du président, le Congrès populaire général (CPG) comptait quelque 170 députés. Cependant, entre 40 et 50 d’entre eux sont démissionnaires, selon des proches du régime. «Un vote en faveur de la loi équivaudrait à approuver le massacre d’innocents», a affirmé auparavant un communiqué du mouvement des Jeunes pour le changement. Les protestataires ont reçu lundi dernier l’appui de chefs de l’armée, dont le général Ali Mohsen Al Ahmar, responsable du nord-est qui comprend la capitale. Le président Saleh, dont le mandat expire fin 2013, avait proposé mardi de quitter le pouvoir au début 2012, mais l’opposition parlementaire a rejeté cette option. Lâché par une partie de l’armée, des cadres, des diplomates postés à l’étranger et des chefs de tribu, le président du Yémen, Ali Abdallah Saleh, abat ses dernières.

Hier, le Président a réitéré sa proposition pour sortir de la crise. Il s’agit de «la tenue d’élections parlementaires avant la fin 2011, suivies de l’élection par les députés d’un président début 2012». Néanmoins, l’opposition a exigé comme solution en conséquence le départ du Président. Mardi dernier, outre la proposition en question, le Président a menacé le pays d’une guerre civile en cas de coup d’Etat. «Toute tentative d’arriver au pouvoir par un coup d’Etat conduirait à la guerre civile», a indiqué Abdallah Saleh, dans une déclaration transmise par la télévision publique. Il a averti que «toute division au sein des forces armées aurait des conséquences négatives sur l’ensemble du pays». Alors que lundi dernier, d’importants chefs militaires, dont des généraux, ont rejoint le mouvement de contestation populaire. «Ne vous résignez pas à la dictature de l’information et préservez la sécurité et la stabilité du pays», a ajouté le Président. Quant aux officiers et diplomates qui ont fait défection, ils «tombent comme les feuilles mortes». Cela dit, «il n’est pas trop tard pour eux de revenir à la raison». S’adressant aux manifestants, il les a qualifiés de «victimes de forces politiques vieillissantes comme les nassériens, les communistes et les houthis», les rebelles zaidites de confession chiite dans le nord du pays.

Le même jour, le secrétaire américain à la Défense, Robert Gates, a observé que l’instabilité au Yémen pourrait entraîner un relâchement de la lutte contre Al Qaîda. «Nous sommes évidemment préoccupés par l’instabilité au Yémen», a déclaré Robert Gates. «L’instabilité et le détournement de l’attention vis-à-vis d’Al Qaîda est certainement ma préoccupation première dans cette situation», a affirmé Robert Gates. Notons que mardi dernier, les ambassadeurs du Yémen au Pakistan, au Qatar, à Oman et en Espagne ont rejoint les opposants au régime. «Nous déclarons notre soutien total aux jeunes et à leur demande», ont indiqué dans un communiqué ces ambassadeurs. Comme ils ont appelé «les dirigeants yéménites, les sages au sein de l’armée, dans les institutions publiques, les penseurs et les religieux à faire prévaloir l’intérêt suprême du Yémen sur leurs intérêts personnels». A son tour, le consul yéménite à Dubaï a fait défection. La contestation, lancée fin janvier, a culminé après la mort le 18 mars de 52 personnes dans une attaque contre des manifestants à Sanaa attribuée à des partisans du régime.
Amnay idir