L’Algérie se réfère aux accords de Taïf

SYRIE-LIBAN

L’Algérie se réfère aux accords de Taïf

Le Quotidien d’Oran, 24 février 2005

L’Algérie a tenu à rappeler que le retrait des troupes syriennes du Liban est régi par l’accord de Taïf. Elle a aussi souligné que le sommet de la Ligue arabe, qu’elle abritera les 22 et 23 mars prochains, exprimera sa solidarité et son soutien à Damas dans son combat pour la récupération du Golan et afin de faire face aux pressions étrangères qu’elle subit.

Pourtant organisatrice du sommet des chefs d’Etat arabes, prévu les 22 et 23 mars prochains, l’Algérie est restée curieusement silencieuse sur d’importantes questions relatives à la situation explosive au Moyen-Orient. Il s’agit, en évidence, des demandes de Bush et de Sharon. La première relative à l’adoption par le sommet d’Alger d’une résolution exigeant de la Syrie le retrait de ses troupes du Liban et la seconde «souhaitant» la normalisation des relations d’au moins dix pays arabes avec Israël.

L’on remarque, cependant, qu’Alger a préféré clarifier sa position à partir du Caire en permettant à son représentant auprès de la Ligue arabe, son ambassadeur en Egypte, Abdelkader Hadjar d’en parler à la presse arabe. Il déclara à un média arabe d’une part «qu’il y a une insistance sur l’indépendance de la décision arabe» et d’autre part que «le retrait syrien du Liban est régi par l’accord de Taïf». Voilà une précision qui rappelle clairement des faits palpables de l’Histoire que ni les Etats-Unis, ni la France, encore moins les Arabes (qui ont signé l’accord de Taïf) ne peuvent renier. Il est vrai qu’aujourd’hui la situation n’est plus la même par rapport à ce qu’elle était en 1987, année de la signature de l’accord en question. Mais il est impératif que les grandes puissances comprennent que si les choses doivent évoluer pour Israël, elles doivent aussi l’être pour le monde arabe. D’ailleurs, le représentant de l’Algérie à la Ligue arabe l’a bien souligné en soutenant que «le sommet d’Alger exprimera son soutien à la Syrie dans son combat pour la récupération du Golan et se solidarisera avec elle contre ce qu’elle subit comme pressions étrangères, notamment pour ce qui touche à sa souveraineté».

Les propos de Hadjar ne souffrent d’aucune ambiguïté qui puisse faire douter du respect de l’Algérie de ce qu’elle a toujours défendu comme principes et comme convictions à propos du conflit israélo-arabe. Le reste n’en tiendra qu’à la volonté de l’ensemble des dirigeants arabes pour constituer des interlocuteurs capables, enfin, de fermeté et de prises de décisions concrètes. Abdelkader Hadjar profitera aussi, pour rappeler la position de l’Algérie à propos de l’initiative américaine «Le Grand Moyen-Orient». Il notera, en effet, que «l’Algérie n’est pas concernée par ce projet car elle a mis en oeuvre les réformes politiques depuis des années, avant même que les Etats-Unis n’en parlent». Pour être plus convaincant, il enchaînera sur l’évolution positive de la situation de la femme algérienne ainsi que sur les réformes en cours du système éducatif. Hadjar ne manquera pas d’ailleurs de s’interroger: «qui a donné le droit à un Etat étranger de demander à d’autres Etats de réformer leurs systèmes conformément à ce que lui veut?». Alger tient donc à ignorer la proposition américaine et plaide pour faire valoir son rejet de l’ingérence étrangère et son respect des spécificités de chaque pays. Mieux encore, l’Algérie considère, par la voix de son représentant à la Ligue arabe que «l’idée du Grand Moyen-Orient ainsi que celle des réformes telles que soumises par l’administration américaine ne sont qu’un mécanisme pour servir Israël et pour qu’il se maintienne en tant qu’entité acceptable dans la région». Jusque-là, l’on pourrait prétendre que l’Algérie compte véritablement faire du sommet de la Ligue arabe, qu’elle abritera en mars prochain, un sommet «historique et décisif».

Abdelkader Hadjar sera, en outre, interrogé sur l’évolution du projet de réforme de la Ligue arabe notamment pour ce qui concerne la structure de suivi de la mise en oeuvre des décisions ainsi que le mode de vote. Le représentant algérien a précisé, au sujet de la structure en question, qu’il y a eu consensus pour qu’elle soit sous la forme d’une troïka composée des présidents et ministres des Affaires étrangères du sommet précédent, de celui actuel et de celui à venir avec en plus le secrétaire général de la Ligue arabe. Pour ce qui est du mode de vote, il a souligné que «la majeure partie des pays et l’Algérie avec, se sont entendus pour que le vote se fasse à la majorité des deux tiers pour ce qui concerne les questions de fond et à la majorité absolue (50+1) pour celles de procédure». Il notera, cependant, que deux pays s’opposent à cette thèse et insistent pour que le vote continue à se faire selon l’ancien système consacré par la charte de 1945. Un point non encore tranché et que Hadjar confirme qu’il figure dans l’ordre du jour du sommet d’Alger. Le chef de l’Etat a, selon le média arabe, promis au secrétaire général de la Ligue arabe que la question relative au poste de SG tournant de la Ligue, ne sera pas examinée par le sommet.

Ghania Oukazi