L’Algérie participe au sauvetage du groupe Alstom

L’ALGÉRIE PARTICIPE AU SAUVETAGE DU GROUPE

Alstom : le contrat

Le Soir d’Algérie, 8 juin 2004

Moins de dix jours après avoir reçu l’accord de la Commission européenne pour un plan de sauvetage, Alstom a décroché le marché de l’électrification du réseau ferroviaire algérien. La situation financière difficile d’Alstom n’indispose pas la partie algérienne. Cet accord conclu est perçu par certains milieux comme un «coup de pouce» au partenaire français, qualifié de «stratégique». Du côté de la SNTF, on répond que la législation est claire : la commission d’évaluation des marchés ne prend pas en compte la situation des entreprises soumissionnaires et se contente de vérifier la conformité de l’offre avec le cahier des charges.
Nawal Imès – Alger (Le Soir) – Le contrat représente pourtant une aubaine pour le groupe sauvé in extremis du gouffre et venu se refaire une santé en Algérie. D’un montant de 88 millions d’euros, il porte sur l’équipement de trois lignes de chemin de fer et l’électrification des voies sur les lignes du chemin de fer Alger-Thénia, Oued-Smar- Gué-de-Constantine et El- Harrach-El Affroun d’ici 2007. C’est en association avec la Société nationale des transports ferroviaires et de l’Entreprise de construction de structures métalliques industrialisées (Baticim) que le français, associé à raison de 71 millions d’euros, participera à la modernisation du réseau ferroviaire de la SNTF. Pas moins de 300 kilomètres de caténaires et trois sous-stations électriques devront être réalisés, avec comme objectif principal : faire passer le nombre de voyageurs de 20 millions à 60 millions à l’horizon 2010. Comment Alstom a-t- il réussi à rafler le marché ? Lorsque la SNTF avait inscrit le projet de l’électrification à l’ordre du jour, c’est le bureau d’étude allemand Deutsch Eisenbahn Consulting qui s’est chargé de l’étude de faisabilité. Le 9 juillet 2003, un avis d’appel d’offres national et international est alors lancé. Six entreprises font part de leur intérêt pour le projet : le chinois CCECC, le Groupement de la même nationalité CITIC-CSCECCREC, le groupement franco- algérien Alstom France- Alstom Algérie-Batecim- Infra-rail, le groupement Siemens Allemagne- Siemens Belgique, l’espagnol INABESA-Cobra et ETRHB-Tekser ont été retenus en attendant l’étude de l’offre financière. Après examen de ces dernières, Alstom a été placée première. C’est au terme de ce processus que le contrat a été signé à Alger. Il faudra cependant attendre l’avis de la commission nationale des marchés, conformément au décret présidentiel 02/250 de juillet 2002 régissant les marchés publics. Avec la concrétisation de ce contrat, le groupe français renforce sa position en Algérie : en août dernier, il avait déjà pu obtenir un marché de 123 millions pour la construction d’une centrale électrique à Fkirina, tout en travaillant avec Sonelgaz sur la création d’un bureau de contrôle et de conduite pour le réseau électrique de la région ouest. Un projet de près de 380 millions d’euros qui intéresse Alstom au plus haut niveau. C’est lors de l’accord récemment paraphé que les responsables français ont fait le déplacement à Alger. Après neuf mois de négociations avec la commission européenne, Paris a enfin reçu l’aval de Bruxelles. L’accord prévoit «l’entrée de l’Etat au capital du groupe (18,5 % d’abord puis 31,5 % au maximum) contre des cessions d’activité, pour 1,5 milliard d’euros, et l’assurance qu’Alstom signera d’ici quatre ans des partenariats avec ses concurrents. Le plan de sauvetage d’Alstom prévoit une recapitalisation du groupe entre 1,5 et 2,2 milliards d’euros ainsi que des cessions d’actifs supplémentaires. L’Etat, qui transformera une partie des dettes en capital, sera actionnaire de la société à hauteur de 18,5%. L’accord prévoit, par ailleurs, une ligne de cautions bancaires de 8 milliards d’euros destinés à couvrir les besoins commerciaux sur deux ans». Quelques jours plus tard, les plus importantes banques d’Alstom ont donné leur accord pour accompagner le plan de sauvetage. BNP, Paribas, Calyon (Crédit agricole-Crédit Lyonnais), Société Générale, Natexis, CDC Ixis, CIC (Crédit Mutuel) et HSBC-CCF acceptent de garantir, à raison de 1 milliard d’euros, l’augmentation du capital. Ce happy-end est le résultat de l’acharnement de la partie française : le krach entre Paris et Bruxelles a été évité de justesse. Pour rappel, Le groupe avait présenté, dès 2002, les premiers signes de défaillance. Avec un déficit de 5 milliards, l’entreprise commençait à battre de l’aile. En voulant assurer une trop rapide expansion, Alstom a racheté en 1999-2000, le groupe suisse-allemand ABB qui construisait des turbines à gaz, ce qui entraîna un surcoût de 2,5 milliards d’euros. Touché de plein fouet par la crise du transport, Alstom était alors au bord de l’asphyxie. Le marché algérien constitue pour le groupe une soupape de sûreté.
N. I.