L’accord d’association sur une mauvaise pente

Algérie-Union européenne

L’accord d’association sur une mauvaise pente

Liberté, 3 décembre 2017

L’accord d’association, liant l’Algérie à l’Union européenne, signé en 2002 et mis en œuvre en 2015, traverse une mauvaise passe en ce moment. Bruxelles n’a pas apprécié le fait qu’Alger ait instauré, début 2016, le régime des licences d’importation, considérant cette mesure contraire à certaines dispositions contenues dans l’accord. Et, cela semble avoir donné lieu à une sorte de méfiance, justifiée ou pas, entre les deux partenaires. À Bruxelles, dans les édifices somptueux aux baies vitrées abritant les institutions européennes, de hauts fonctionnaires de l’Union sont “fâchés” de cette situation, même s’ils relèvent, pour des raisons de convenances diplomatiques et politiques, que l’Algérie reste un partenaire “important” et “privilégié” de l’Europe des Vingt-huit. Et l’argument avancé par Alger, selon lequel, les mesures prises pour réfréner l’emballement des importations, en période de crise financière, sont “conjoncturelles”, ne paraît pas suffisant pour les convaincre. Les Européens récusent, par ailleurs, les critiques formulées par la partie algérienne sur le fait que l’UE ait mis en place des barrières normatives rendant le marché communautaire très peu perméable aux produits en provenance d’Algérie, allusion faite ici aux barrières non tarifaires qui ont fait que le flux des marchandises a toujours évolué à l’avantage de l’UE, produisant un manque à gagner considérable pour l’Algérie. En dix ans d’application de l’accord, l’Algérie n’a, en effet, exporté vers l’UE que pour 14 milliards de dollars. Elle a importé pour 220 milliards de dollars, soit 22 milliards de dollars par an. Il en a résulté un manque à gagner, sur dix ans, estimé à plus de 700 milliards de dinars (plus de 7 milliards de dollars ) en termes de recettes fiscales, et, rien qu’en 2016, le manque à gagner s’est élevé à 120 milliards de dinars (1,2 milliard de dollars).

Une réunion bilatérale, le 7 décembre

Il a culminé à 140 milliards de dinars (1,4 milliards de dollars) en 2015. Il a été de l’ordre de 7,7 milliards de dinars (près de 77 millions de dollars) en 2005, et de 38,8 milliards de dinars (388 millions de dollars) en 2007… Le déséquilibre est, certes, manifeste. Faut-il pour autant jeter la pierre aux Européens ? Il est vrai que l’accord d’association permet à l’Union européenne d’exporter vers l’Algérie des quotas annuels de différents produits soumis à des taxes douanières dégressives. Mais, il est tout aussi vrai qu’il autorise l’Algérie à exporter, si elle en a les capacités, des quantités contingentées vers le marché communautaire. Le problème est qu’il n’existe pas beaucoup de sociétés algériennes portées sur l’international qui soient en mesure d’y placer leurs produits, d’autant plus qu’il y a sur ce marché une panoplie de normes à respecter et une concurrence féroce entre grands groupes rompus au commerce international. Concernant le dysfonctionnement de l’accord, Alger et Bruxelles paraissent, cependant, disposés à y remédier et à regarder vers l’avenir. Une évaluation de l’accord d’association a été faite, les problèmes qui se posent ont été “sériés, un certain nombre de priorités en matière de coopération dans le cadre de cet accord ont été établies, d’autres le seront à l’occasion d’une réunion prévue le 7 décembre prochain à Alger entre Européens et Algériens”, explique-t-on du côté algérien. L’Algérie a défini, sur la base d’un rapport d’évaluation dudit accord, un “package” de priorités sectorielles devant bénéficier de la politique communautaire de développement. Elle souhaite avoir un soutien aux échanges économiques et commerciaux, un appui à la diversification et à la compétitivité de l’économie algérienne. De même, elle exige un apport européen en matière de développement des investissements, un renforcement de la coopération sectorielle dans les domaines prioritaires liés à l’agriculture et la pêche, à la recherche… De telles thématiques n’avaient pas été plus clairement délimitées, par le passé.

Y. S.