Accusations de fraudes : «Des allégations», selon Zerhouni

Accusations de fraudes : «Des allégations», selon Zerhouni

Le Quotidien d’Oran, 11 avril 2009

«Je dis bien allégations», a répété le ministre d’Etat, ministre de l’Intérieur et des Collectivités locales, en réponse aux nombreuses questions sur la fraude et les dépassements qui ont émaillé le scrutin de jeudi dernier.

Interrogé à plusieurs reprises sur la fraude et les dépassements qui ont émaillé le scrutin de jeudi, le ministre sera à court d’arguments. Il dira simplement «j’espère que les observateurs internationaux auront à répondre à ma place.» Il qualifiera même «d’allégations» les plaintes exprimées par les candidats à cet effet. Il leur fera savoir que «personne ne nous a apporté des faits précis et concrets. Il leur a donc été demandé de procéder aux recours réglementaires devant la commission administrative de surveillance des élections. Ils ont aussi toute latitude de présenter leurs plaintes devant le Conseil constitutionnel.» Le ministre répète «je dis bien des allégations parce que dans les bureaux de vote où ces dépassements ont été signalés, le nombre d’électeurs inscrits est réellement minime. La totalité des votes qui ont été détournés, c’est une quantité négligeable, c’est epsilon.» Il continue «au pire, si je concède qu’il y a eu dépassement, ça n’a pas eu d’influence sur les résultats.» Aux candidats qui se sont plaints par téléphone à son ministère, Zerhouni indiquera «on leur a demandé de le prouver, d’apporter un minimum d’indications, aucun n’a rappelé.» Et pour clore le sujet, il lance «je fais appel à votre objectivité et à vos constatations.» A une question sur les incohérences dans les listes électorales, il reconnaît juste qu’«effectivement, on nous a signalé 30 citoyens qui n’ont pas voté mais ils ne l’avaient pas fait depuis une dizaine d’années, ça a été pris en compte.» Mais, dira-t-il avec une pointe de fierté, «30 cas, ce n’est pas une fraude massive, si fraude y a eu ! Je pense qu’il y a eu défaillance dans une commune.»

Par contre, il a affirmé que «nous avons eu quelques cas de manipulation par ceux qui ont appelé au boycott, au niveau d’une dizaine de bureaux de vote, tentatives de saccage, menaces contre les électeurs, jets de cocktail Molotov notamment dans la wilaya de Bouira.» Mais selon lui, seuls deux bureaux où étaient inscrit 5.800 électeurs ont été fermés. «Ces tentatives incombent à des gens qui ont prôné le boycott, ils sont connus tout autant que leurs responsables», a-t-il affirmé. Il rappelle que «j’ai déjà dit qu’on n’empêchera pas les gens du boycott de s’exprimer. Des salles de meeting ont été équitablement et gratuitement réparties sur les candidats. On a eu deux situations ou trois, Mascara, Sidi Bel-Abbès, j’en suis pas sûr, et Tizi Ouzou où des gens sont venus demander des salles qui étaient déjà prises.»

 

«(…) la victoire d’une prise de conscience»

Zerhouni a qualifié «cette forte participation» de surprise mais a-t-il dit «si vous retournez en arrière, il y a une situation qui l’explique, en premier, les préparatifs de ces élections, les efforts déployés par les collectivités locales à l’exemple de l’assainissement de 92% des listes électorales.» Particulièrement, explique-il, «les opérations de proximité menées par les jeunes auprès de 1.630.000 nouveaux logements qui nous ont permis de clarifier la situation de plus de 2 millions de familles d’électeurs.» Le ministre relève comme 2e indice «la manière et l’hospitalité dont ont fait preuve les deux millions de familles visitées.» Comme 3e indice, il fera la comparaison entre 2004 et 2009 «du nombre de citoyens qui ont pris l’initiative d’aller à l’APC pour demander la correction ou le réajustement de leur statut d’électeur et surtout préciser le changement d’adresse.» Les scores enregistrés à Béjaïa et à Tizi Ouzou ne constituent pas à ses yeux «une surprise, ça prouve seulement que c’est la victoire d’une prise de conscience des habitants de ces régions qui ont remarqué que certaines personnes ont essayé de les mener sur le mauvais chemin (…)».

 

«(…) la victoire du cadre législatif»

Il revient au taux de participation pour lui trouver une explication dans le fait que «les Algériens ont vu ce qu’ont fait le président et le gouvernement pour prendre en charge les problèmes notamment sociaux.» Il note que «les journalistes qui ont suivi la campagne électorale des candidats ont relevé le nombre extraordinaire de personnes qui ont participé aux meetings et rencontres de proximité. Il y a eu plus de deux millions d’Algériens comparativement à la campagne de 2004 où on y a compté moins de 1.250.000 personnes.» Il continue ses explications en s’amusant à comparer deux situations diamétralement opposées, la période coloniale et celle des années 2000, où le prix du baril de pétrole avait atteint 146 dollars pour conclure que «ce sont là des données qui prouvent que les résultats peuvent être considérés comme un miracle.»

A propos du faible taux de participation de la communauté algérienne à l’étranger, Zerhouni répondra «vous savez dans quelles conditions sont organisées les élections à l’étranger. Il y a donc des Algériens qui, pour des raisons objectives et matérielles, n’ont pas voté.» Le ministre de l’Intérieur avait commencé par dire que «le peuple algérien a su dépasser les contingences pour exercer son droit et faire son devoir par l’exercice du suffrage universel, pour élire celui ou celle qu’il juge digne de le représenter au mieux, de le guider et de défendre ses intérêts», a déclaré hier Nouredine Yazid Zerhouni, au début de son intervention. Il estime que c’est un scrutin que «rien n’aura altéré malgré quelques incidents et tentatives avortés pour le perturber.» Scrutin à travers lequel, il voit «le progrès et la victoire offerte à la nation et aux générations futures pour l’édification et la consécration de notre démocratie et de l’Etat de droit.» Le scrutin du 9 avril, c’est, selon lui, «la victoire de la volonté, mais c’est aussi celle du cadre législatif et réglementaire du système électoral algérien et du dispositif de garantie de transparence des opérations électorales.» Le tout a consolidé, selon lui, chez les Algériens «un puissant sentiment de fierté nationale à la hauteur de l’ambition de notre peuple à choisir librement et en toute souveraineté l’homme ou la femme appelé à le prendre en charge.» L’élection présidentielle du 9 avril a coûté, selon lui, entre 5 et 6 milliards DA, tout confondu.