Des dissidents de l’ex-rébellion derrière l’attaque du poste de sécurité

DIX MORTS AU MALI

Des dissidents de l’ex-rébellion derrière l’attaque du poste de sécurité

par Djamel B., Le Quotidien d’Oran, 13 mai 2007

L’attaque perpétrée, vendredi matin, contre un poste de sécurité des forces maliennes, près de la frontière algérienne, a été perpétrée par un des dissidents de l’ex-rébellion touarègue, ont indiqué hier des sources militaires maliennes. Huit rebelles et deux militaires ont été tués dans cette attaque, a annoncé samedi à l’AFP un responsable de l’armée, précisant qu’il s’agissait d’un bilan «provisoire». «Nous avons perdu deux hommes, mais il y a huit rebelles qui ont été tués. C’est un bilan encore provisoire. Actuellement, nous sommes en train de ratisser la zone, à la recherche des rebelles qui ont pris la direction du Niger», a-t-il affirmé. Les combats avaient débuté à quelques kilomètres de la frontière algérienne, puis s’étaient poursuivis dans le Tamasna, une plaine s’étendant du nord-est du Mali au Niger voisin, a-t-il précisé. Il a par ailleurs indiqué que les assaillants ont reçu le soutien de «rebelles touaregs venus du Niger».

Le poste de sécurité, situé à l’entrée de la ville de Tinzaouatène, a été pris d’assaut tôt vendredi matin par «quelques dizaines d’hommes» armés conduits par un ancien rebelle touareg, Ibrahima Bahanga, un des leaders de l’ex-rébellion touarègue, a indiqué le général Mahamadou Diagouraga, président du comité tripartite de suivi de l’Accord de paix intervenu le 4 juillet 2006 à Alger entre les autorités maliennes et l’ancienne rébellion touarègue. D’importants renforts militaires ont été envoyés vers la localité a affirmé le général Diagouraga, qui a mis le raid sur le compte d’une «provocation» à laquelle «il faudra répondre avec beaucoup de fermeté». Selon un officier sous couvert de l’anonymat, cité par l’AFP, les militaires du poste de sécurité ont défendu, pendant plusieurs heures, leurs positions et attaqué, obligeant les assaillants à se replier vers la frontière nigérienne. «Il y a eu au moins deux morts et plusieurs blessés dans nos rangs et dans leurs rangs», a-t-il affirmé. La même source n’a pas souhaité préciser le bilan pour chaque camp. D’autres sources indépendantes jointes par l’AFP dans la région ont confirmé l’attaque, en évoquant également deux morts et un nombre indéterminé de blessés, sans pouvoir donner de détails. D’après les habitants de la région, jusqu’au milieu de l’après-midi du vendredi, des tirs étaient toujours entendus, mais le calme était revenu tard dans l’après-midi.

En réaction à cette attaque, le porte parole de l’ex-rébellion touarègue malienne, Amada Ag Bibi, a affirmé hier qu’il se désolidarise totalement de l’attaque. «C’est un acte que nous condamnons fermement. Nous, nous avons opté pour la paix, et nous sommes sur cette route. Ibrahim Bahanga n’agit pas en notre nom, et il n’y a pas du monde derrière. Il faut que cela soit clair. Nous sommes pour la paix», a déclaré Amada Ag Bibi. Le vendredi, le même responsable avait déjà déclaré que son mouvement n’était pas du tout impliqué dans cette histoire, précisant qu’au moment de l’attaque il était à Kidal, à 1.000 km au nord-est de Bamako, en même temps que les éléments de l’ex-rébellion qui ont déposé les armes sont à Kidal. «Nous sommes étrangers à ce qui s’est passé et si quelqu’un est impliqué dans cette attaque, qu’il ne se réclame pas de nous. Nous, nous sommes pour la paix», avait souligné le porte-parole de l’ex-rébellion.

En 1998, Ibrahim Bahanga avait demandé aux autorités maliennes la création d’une nouvelle commune dans sa région de Kidal, dans le cadre d’une politique de décentralisation.

Pour arriver à ses fin, il avait à l’époque enlevé et retenu en otages une dizaine de personnes, dont des militaires supervisant une campagne de vaccination. Un officier avait été tué dans une tentative de riposte et les otages avaient été libérés à la faveur d’une médiation algérienne.

En mai 2006, plusieurs centaines d’ex-rebelles touaregs avaient attaqué deux camps militaires de la ville de Kidal, emportant des armes et des munitions, avant de se retrancher dans des collines de cette région frontalière de l’Algérie. A la suite d’un accord signé deux mois plus tard à Alger sous l’égide des autorités algériennes, ils avaient accepté d’être cantonnés et de remettre les armes saisies, alors que Bamako s’était engagé de son côté à les assister dans leur réinsertion économique et sociale.

En mars dernier, plusieurs centaines d’ex-rebelles touaregs maliens, qui avaient attaqué les deux camps militaires à Kidal, étaient revenus dans cette ville dans le cadre de l’accord de paix signé avec les autorités. Environ 2.000 ex-rebelles avaient remis leurs armes, pour la plupart saisies lors de ces attaques.

La restitution de ces armes est intervenue suite à la signature en février dernier à Alger, entre le gouvernement malien et l’Alliance démocratique du 23 mai pour le changement, sous l’égide de l’Algérie en sa qualité de facilitateur, de trois documents pour l’exécution de l’accord de paix, de sécurité et de développement de la région de Kidal.

Ces documents portent sur le calendrier des étapes pour la remise des armes, le procès-verbal qui a relevé toutes les conclusions des réunions tenues durant une semaine à Alger et sur la préparation d’un Forum international, en mars à Kidal, avec la participation de bailleurs de fonds, tels que les institutions internationales et les banques arabes, africaines et européennes. C’est d’ailleurs à l’issue de ce forum que le gouvernement du Mali et d’anciens rebelles touaregs se sont donné dix ans pour développer les trois régions du Nord.