Les meurtres de Tibéhirine n’ont jamais été élucidés

L’information judiciaire sur l’assassinat des moines français en 1996 a été ouverte mardi

Les meurtres de Tibéhirine n’ont jamais été élucidés

Jean Chichizola, Le Figaro, 12 février 2004

Ouverte mardi, l’information judiciaire sur l’assassinat en 1996 des septs moines français de Tibéhirine (Algérie) a été confiée hier ax juges d’instruction antiterroristes Jean-Louis Bruguière et Jean-François icard. Le 8 décembre dernier, Me Patrick Baudouin, ancien responsable de la Fédération internationale des droits de l’homme, avait porté plainte contre X pour « enlèvement, séquestration et assassinat » au nom de la famille de l’un des moines et de l’ancien procureur général de l’ordre.

L’enlèvement des religieux, survenu dans la nuit du 26 au 27 mars 1996, avait été revendiqué en avril par le Groupe islamique armé (GIA). Un second communiqué, signé du chef du GIA, Djamel Zitouni, avait ensuite annoncé que les moines avaient été assassinés le 21 mai. Leurs têtes avaient été retrouvées quelques jours plus tard dans la région de Tibéhirine. Les circonstances de ces assassinats n’ont jamais été véritablement élucidés. Si la responsabilité du GIA ne semble pas contestée, deux thèses s’affrontent: une manipulation des services de renseignements algériens ayant mal tournée ou un massacre perpétué par les islamistes sans aucune intervention extérieure.

L’implication présumée des services secrets algériens est largement évoquée dans la plainte déposée par Me baudouin. Elle cite notamment les témoignages de trois anciens militaires algériens dont deux ex-collaborateurs de la DRS (service du renseignement militaire plus connu sous son ancien nom de Sécurité militaire). Ces derniers affirment que le GIA était infiltré par l’armée algérienne et que son chef de 1994 à 1996, Djamel Zitouni, était un agent de la DRS. Ancien adjudant de la Sécurité militaire, Abdelkader Tigha, aujourd’hui réfugié aux Pays-Bas, va jusqu’à avancer que son ancien service a organisé l’enlèvement avant que celui-ci ne tourne mal en raisons des rivalités internes au GIA. Les parties civiles françaises demanderont, à n’en pas douter, l’audition de ces témoins, contestés à Alger, mais aussi dans certains cercles parisiens. Les auditions des anciens responsables des services de renseignements français en poste en 1996 et des responsables gouvernementaux de l’époque devraient également être demandés.