Dossier des moines de Tibehirine : La justice parisienne se saisit de l’affaire

Dossier des moines de Tibehirine : La justice parisienne se saisit de l’affaire

par Aït-Chaâlal Mouloud , Le Jeune Indépendant, 11 février 2004

La justice française a décidé, hier, de se saisir de l’affaire des sept moines trappistes de Tibehirine (Médéa), assassinés après deux mois d’enlèvement, il y a sept ans par le groupe islamique armé (GIA) Suite à une plainte déposée en décembre dernier par des membres de la famille d’un des moines assassinés, le parquet de Paris a ouvert une information judiciaire pour «enlèvements, séquestrations et assassinats en relation avec une entreprise terroriste», a annoncé leur avocat, Me Patrick Baudouin.

L’information est ouverte contre X et devrait être confiée au juge d’instruction Jean-Louis Bruguière, connu pour avoir pris en main plusieurs enquêtes sur des cellules terroristes en France, dont certaines liées au GIA. La plainte a été déposée par la famille du père Christoph Lebreton le numéro deux de l’ordre cistercien qui se fondait sur de nouveaux témoignages selon lesquels leur assassinat fait suite à «une bavure» des services de sécurité algériens.

Lors du dépôt de la plainte, Me Baudouin souhaitait qu’un juge de droit commun enquête sur ces morts pour que la piste terroriste ne soit pas la seule privilégiée. Cette plainte, selon Me Baudoin, qui s’exprimait devant la presse parisienne, pose des interrogations sur les conditions de l’enlèvement et de séquestration, et le véritable rôle de Djamel Zitouni.

«D’où la nécessité d’une instruction qui remette les choses à plat et qui essaye d’obtenir tous les témoignages, de l’enlèvement à l’assassinat.» L’implication du GIA dans l’enlèvement au cours de la nuit du 26 au 27 mars 1996 de ces sept religieux de la communauté monastique de Notre Dame de l’Atlas, à Tibéhirine (80 km au sud d’Alger), et leur exécution étaient établies.

Le 26 avril, un communiqué signé par le chef des GIA Djamel Zitouni revendiquait leur enlèvement et proposait à la France un échange de prisonniers. L’affaire des moines trappistes a rebondit en 2002 lorsque des voix ont commencé à montrer du doigt la sécurité militaire algérienne (DRS) sans que ces accusations soient confirmées.

En juillet 2002, un ancien militaire algérien, Abderrahmane Chouchane, déclarait en effet que Djamel Zitouni avait eu une double casquette, de chef des GIA et d’agent de la sécurité militaire. Puis, Abdelkader Tigha, ancien membre déserteur de la sécurité militaire, arrêté à Bangkok (Thaïlande) affirmait en décembre de la même année dans un entretien controversé accorde au quotidien français Libération que l’enlèvement des moines avait été l’œuvre de ses services.

Ces accusations avaient été dénoncées par des responsables sécuritaires qui y voyaient une nouvelle cabale montée contre l’armée algérienne. A.-C. M.