«Incitation à la désobéissance civile»

BOUGUERRA SOLTANI À PROPOS DU CODE DE LA FAMILLE

«Incitation à la désobéissance civile»

El Watan, 11 september 2004

Bouguerra Soltani, président du MSP, a poussé le bouchon à son maximum, hier, dans un meeting populaire animé à la salle Ibn Khaldoun, à Alger. Evoquant la nouvelle version du code de la famille, entérinée en Conseil de gouvernement, M. Soltani n’a pas hésité à qualifier les amendements proposés par la commission Zeghloul d’«incitation à la désobéissance civile».

Selon lui, le législateur a piétiné les fondements et les dogmes de la société algérienne. Montant au créneau contre ces amendements, le n°1 du MSP a émis 11 critiques à l’égard du travail accompli par la commission Zeghloul. Il a accusé celle-ci de n’avoir pas respecté «la Constitution, la charia et le projet novembriste». Selon M. Soltani, le moment n’est pas «opportun» pour amorcer le débat sur le code de la famille. Pour lui, «cela n’est pas la revendication des Algériens, du moins pas celle de la majorité d’entre eux». L’amendement du code de 1984 obéit, d’après lui, aux «pressions de l’Occident, au courant laïc et aux femmes salonnardes», avant de faire rappeler les deux «lignes rouges» de sa formation sur lesquelles il ne reculera jamais, à savoir l’éducation et la famille. «A ces gens qui s’attaquent à la cohésion nationale, en tentant de laïciser notre société, nous leur dirons qu’ils ne réussiront pas. Pour ça, nous y ferons face», a-t-il martelé. Prêchant la parole de Dieu et de son Prophète Mohamed dans une salle clairsemée, M. Soltani a tenté de convaincre l’assistance de «la justesse» de la position de son parti. «Le tutorat n’est nullement la soumission de la femme à l’homme. C’est une protection de cette dernière et une garantie. En supprimant le tuteur, on déshonore la fille et on l’expose à tous les périls», a-t-il expliqué. Dans le même registre, le leader du MSP estime que la polygamie n’est pas un «problème», car, en Algérie, il y a seulement 1% de «polygames». Pourquoi l’a-t-on supprimée ?, s’est-il demandé. M. Soltani a refusé également que cette question (la polygamie) soit soumise à l’appréciation du juge, comme il a rejeté aussi l’amendement portant sur le droit de la femme de demander le divorce. Il a ensuite battu en brèche tous les amendements relatifs à l’héritage et au droit de la femme divorcée ayant obtenu la garde des enfants de rester dans le domicile conjugal jusqu’à ce que son ex-mari lui trouve un foyer décent. L’argument de l’ex-Hamas, à ce propos, est que cette disposition exacerbera la crise de logement. Abdelmadjid Menasra, vice-président du parti, a saisi l’occasion pour répondre au président du Sénat ainsi qu’au chef du gouvernement sur la question du référendum sur le code de la famille. Pour Menasra, «le MSP demande un référendum et maintient sa proposition. Car si ceux qui ont opéré cette révision disent que c’est le peuple qui a voulu cela, nous leur demandons de le prouver par voie référendaire. Sinon, pour nous, le peuple a voté contre l’occidentalisation et laïcisation de l’Algérie lors de la présidentielle du 8 avril», a-t-il précisé. M. Menasra demandera ainsi au «président de la République d’intervenir pour arrêter ce complot contre la famille algérienne» Pour lui, l’Alliance présidentielle ne peut pas subsister dans ce sillage de la réforme du code de la famille. M. Soltani, revenant sur le sujet, a estimé qu’il existe d’autres priorités que le code de la famille. A l’occasion, il a émis le vœu de voir ce nouveau projet bloqué par le Conseil des ministres. D’après lui, la priorité va à l’amélioration des conditions de vie de la société et à la lutte contre le célibat qui frappe la majorité des jeunes. Pour combattre le phénomène du célibat, M. Soltani souhaite que le gouvernement débourse 5 milliards de dollars. Avec cette sortie de Bouguerra Soltani, les islamistes semblent décidés à frapper sur tous les fronts en vue de contrer les amendements de la commission Zeghloul.

Par M. Aït Ouarabi