Les Planteurs sous tension à Oran

Les Planteurs sous tension à Oran

El Watan, 16 juillet 2006

Les Planteurs, incontestablement le plus grand bidonville d’Algérie, vivra aujourd’hui sur fond de tension une vaste opération de démolition qui touchera pas moins de 790 maisons pour permettre de dégager une emprise pour la future ligne téléphérique. L’entreprise se heurte déjà à la colère d’une bonne partie des riverains.

Selon le comité du quartier Hadj Hassan, « deux requêtes dont l’une en référé ont été introduites hier auprès de la chambre administrative de la cour d’Oran afin de surseoir à la démolition de leurs maisons qui devrait avoir lieu aujourd’hui dans le cadre de l’opération de l’éradication de l’habitat précaire ». Après nos vérifications auprès de la cour d’Oran, nous apprenons que « pour le moment, aucune requête émanant de ce comité de quartier n’a été enrôlée par cette chambre administrative ». Mais loin de ce palais de justice, la journée a été des plus longues hier pour les 790 familles qui vont peut-être vivre leur dernière journée aux Planteurs, le quartier devant faire l’objet, dès aujourd’hui, d’une démolition. Le quartier avait été secoué par une petite agitation le 9 juillet, qui coïncidait avec une séance houleuse de tirage au sort ayant départagé ce premier lot de 790 logements qui a eu lieu au palais des sports. Les Planteurs n’ont renoué ce jour-là avec le calme que grâce à un important déploiement policier qui a vite contenu une foule qui a investi la rue pour exprimer son opposition sur « la manière » dont est géré ce dossier brûlant du relogement. Vendredi dernier, le comité de quartier qui milite pour « un relogement digne et juste » monte au créneau et sollicite la presse locale pour exprimer « ses inquiétudes ». Il lancera un appel solennel au wali d’Oran afin de reporter cette opération de « démolition-relogement » prévue aujourd’hui. Le comité avance déjà le chiffre de « 200 familles se considérant lésées ». Les représentants des populations concernées par cette opération contestaient les résultats d’un recensement effectué en 2003 par le bureau URSA, qui a réussi à attiser le mécontentement d’une bonne partie de riverains qui lui reprochent d’« avoir maladroitement omis plusieurs familles de leur attribuer un logement ». « La plupart des foyers sont constitués de familles élargies qui ne peuvent être relogées dans des F2 ou F3 », se plaint un membre du comité de quartier. « Nous ne supportons plus le manque de concertation, les décisions prises sans que nous ayons pu donner notre avis ou faire d’autres propositions », peste encore ce comité qui dit ne pas être contre l’idée du relogement mais qui dénonce cette manière forte faite dans la précipitation et l’improvisation. Les familles qui sont appelées à emménager dans la nouvelle cité de Haï El Yasmine (est d’Oran) réclament « un nouveau recensement qui tiendra enfin compte de la réalité sociale des habitants ». Ce travail avait enregistré 12 000 familles vivant dans ce quartier populaire qui devait faire objet d’une opération de relogement de 9000 foyers dans le cadre de l’éradication de l’habitat précaire. Une première tranche de 2000 logements devrait être réceptionnée avant l’automne. La nouvelle cité qui devrait abriter les relogés dans des F2 et F3 attise les critiques. Nos tentatives de joindre le wali hier ont été vaines. Ce dernier a fait une déclaration diffusée en boucle durant toute la journée d’hier par la radio locale. Le wali promettait en substance « un relogement dans de bonnes conditions et des indemnisations aux familles qui seront relogées ».

Cherif Lahdiri