Les chiffres en baisse, le nombre des chômeurs en hausse

Les chiffres en baisse, le nombre des chômeurs en hausse

El Watan, 12 avril 2009

Dans le bilan sur mesure que Bouteflika et ses partisans ont brandi pendant la campagne électorale, un exploit laisse perplexes les économistes et les analystes. Il s’agit du taux de chômage en Algérie qui ne serait que de 11,3% en 2008 en baisse de plus d’un point par rapport à 2007 où il était de 13,8%.

Seuls les pays industrialisés peuvent se prévaloir d’avoir un taux aussi bas. Les officiels, qui se plaisent à rappeler que durant les années 1990 le taux de chômage dépassait les 30%, expliquent cette prouesse par la concrétisation de la promesse de Bouteflika de créer un million d’emplois durant les cinq dernières années. Un engagement qu’il a réitéré pour son nouveau quinquennat. Mais en l’absence d’une économie productive, d’un environnement propice pour la création d’entreprises qui sont, comme on le sait, le principal levier pour l’emploi, un tel défi s’apparente à une chimère. Officiellement, l’Algérie compte un peu moins de 1,2 million de chômeurs, selon l’Office national des statistiques (ONS). La plupart des sans-emploi sont des jeunes et des femmes majoritairement des primo-demandeurs. Selon l’ONS, près de 75% de l’ensemble des chômeurs ont moins de 30 ans et 87,8% moins de 35 ans et les femmes représentent 25,8% de l’ensemble de la population active en chômage. Ces données démontrent que le marché du travail est saturé et est incapable d’accueillir les milliers de diplômés qui sortent chaque année de nos universités, dénotant la nécessité d’une réforme en profondeur du secteur de l’enseignement supérieur afin de le mettre au diapason avec les besoins des entreprises. Les universités algériennes sont en total déphasage avec le monde économique, formant ainsi de futurs chômeurs. Le constat est le même pour la formation professionnelle. Les chiffres de l’ONS confirment aussi, si besoin est l’échec des différents dispositifs mis en place par les pouvoirs publics pour lutter contre le chômage. Ni l’Agence nationale de soutien à l’emploi des jeunes (Ansej), ni la Caisse nationale d’assurance chômage (CNAC) et encore moins l’Agence nationale de l’emploi (ANEM) et l’Agence nationale de gestion du microcrédit (Angem) n’ont réussi à créer une dynamique dans le marché de l’emploi. Les perspectives sont encore plus sombres pour les jeunes rejetés très tôt par le système éducatif. Ils seraient 200 000 à être renvoyés chaque année de l’école, selon la Fondation nationale pour la promotion de la santé et le développement de la recherche (Forem), grossissant ainsi les rangs des demandeurs d’emploi. Devant le peu de débouchés qui s’offrent à eux, ils se livrent à des activités aléatoires et à des emplois précaires aux lendemains incertains. En l’absence d’une économie structurée, le marché informel est le principal pourvoyeur d’emplois. Les Algériens s’accommodent de cette situation en s’adonnant à la débrouillardise, intronisée par la force des choses comme mode de vie.

Par Nora Boudedja