Affaire El Khalifa Bank: Les épargnants floués portent plainte

Affaire El Khalifa Bank

Les épargnants floués portent plainte

El Watan, 2 juillet 2005

Après avoir vainement attendu d’être remboursés par l’Etat algérien, les ex-clients spoliés d’El Khalifa Bank ont décidé de saisir la justice.

Une association de clients émigrés, ruinés par la faillite de la banque Khalifa, a porté plainte récemment contre l’ex-patron du groupe Khalifa, le milliardaire Abdelmoumen Rafik Khalifa, a appris hier l’AFP auprès de l’avocat de l’association, Gilbert Collard. La plainte, avec constitution de partie civile, a été déposée « il y a une quinzaine de jours » contre M. Khalifa, pour banqueroute, abus de biens sociaux et blanchiment, selon Me Collard. Trois personnes, dont l’épouse de Abdelmoumen Rafik Khalifa, ont été mises en examen (inculpées). Le 24 mars dernier, cette même association, le collectif des émigrés clients spoliés de la banque El Khalifa, avait demandé au président Bouteflika d’intervenir pour assurer un remboursement intégral de leurs pertes. Après la chute du groupe El Khalifa, en mai 2003, le ministère des Finances avait ordonné, rappelle ce collectif, le remboursement des épargnants dans la limite de 600 000 DA, quel que soit le montant du dépôt initial. Celui-ci avait estimé alors que « certains commis de l’Etat ont failli dans leur mission », notamment la Banque d’Algérie. Un mois après, le 5 avril dernier, alors qu’il se trouvait en visite à Paris, le président de la République, Abdelaziz Bouteflika, avait conseillé aux épargnants floués par la banque El Khalifa de « s’adresser à la justice » en faisant valoir le statut privé de cet établissement financier. « Il est tout à fait clair que la banque Khalifa est une banque privée et que quiconque a un sou dans la banque doit s’adresser à la justice », avait-t-il déclaré. Propos qui n’avaient pas empêché le collectif de réagir en se disant « consterné » et « abasourdi » par les déclarations du Président. Ce collectif avait affirmé ne pas comprendre le revirement de la situation alors qu’il avait déployé des efforts pour exhorter les victimes à faire preuve de patience suite à l’engagement solennel du Président « à rembourser les victimes d’une escroquerie où les institutions de l’Etat ont grossièrement failli à leur mission de contrôle et à leur protection des biens et des personnes ». « Voilà que le chef de l’Etat demande aux victimes de recourir à la justice », a-t-il regretté. Selon Me Eric Turcon, avocat du liquidateur algérien d’El Khalifa Bank, près de 59,9 milliards de dinars (environ 700 millions d’euros) auraient quitté irrégulièrement l’Algérie. Depuis l’ouverture de ce dossier par la justice, une trentaine de personnes ont été inculpées par le magistrat instructeur sur le millier entendu durant l’instruction. Cinq mandats d’arrêt internationaux ont été lancés par la justice contre Abdelmoumen Khalifa – actuellement à Londres – et ses proches collaborateurs, également à l’étranger, alors que cinq personnes, d’anciens cadres d’El Khalifa Bank et un officier de police, ont été placées en détention préventive.

Rabah Beldjenna