L’inflation algérienne inquiète le FMI

Malgré quelques motifs de satisfaction :

L’inflation algérienne inquiète le FMI

par Safia Berkouk, Le Jeune Indépendant, 22 novembre 2007

Le Fonds monétaire international (FMI) a distribué de bons points à l’Algérie après avoir évalué sa situation macroéconomique lors du séjour que vient d’effectuer une de ses délégations. Mais si l’institution a affiché une certaine satisfaction par rapport, notamment, aux résultats des réformes, plusieurs points noirs ont cependant été relevés.

M. Domenico Fanizza, chef de division département Moyen-Orient et Asie centrale au niveau du FMI et chef de la mission qui a visité l’Algérie, a lors d’une conférence de presse qu’il a animée hier à Alger particulièrement attiré l’attention sur la problématique de l’inflation, affirmant que c’est l’un des principaux facteurs à prendre en considération pour pérenniser la croissance hors hydrocarbures.

M. Fanizza estime que l’Algérie doit «éviter que la politique budgétaire expansionniste n’induise une hausse de l’inflation». La maîtrise de celle-ci «est primordiale pour l’activité privée, la sauvegarde du pouvoir d’achat des populations et la protection des couches les plus défavorisées, qui sont les plus touchées par l’inflation».

Pour l’année 2007, le représentant du FMI a noté que «la poursuite d’une politique monétaire prudente devrait permettre de maintenir l’inflation autour de 4 % ou un peu moins, en dépit de la hausse des prix des produits alimentaires frais et importés».

En dehors de l’inflation, la mission du FMI a insisté auprès des autorités économiques du pays sur la qualité des dépenses publiques, estimant que «le plan de consolidation de la croissance ne pourra avoir d’effets durables sur la croissance que s’il améliore véritablement les infrastructures et le capital humain du pays, sans accroître le poids de l’Etat sur l’économie».

Les représentants du fonds ont également insisté sur la nécessité de poursuivre les réformes économiques destinées à promouvoir l’activité privée qui demeure faible. Ils ont par ailleurs jugé que les prix élevés des hydrocarbures permettent à l’Algérie de «pouvoir supporter aisément les coûts et les réformes qui concernent particulièrement la dynamisation du système financier, la modernisation de la fiscalité et une intégration accrue de l’Algérie dans les économies mondiales et régionales, notamment à travers une diversification des exportations.

Selon M. Fanizza, «si le taux de croissance du secteur hors hydrocarbures est maintenu à 6 % pendant les 5 prochaines années, cela sera une étape importante pour le développement des exportations hors hydrocarbures». La mission a constaté que le déficit budgétaire hors hydrocarbures devrait se creuser sous l’impulsion du programme quinquennal ; néanmoins, la position budgétaire reste solide en raison du niveau élevé des recettes d’hydrocarbures.

L’Etat doit clarifier ce qu’il attend des banques publiques Comme c’est souvent le cas, le retard pris dans le secteur financier a encore une fois été relevé. M. Fanizza a déclaré à ce sujet qu’il est «important pour maintenir la croissance hors hydrocarbures d’améliorer l’efficacité du système bancaire».

Cette appréciation a été faite après qu’une mission financière du fonds eut également séjourné en Algérie pour la deuxième fois après celle de 2003. Dans son évaluation, cette mission a relevé que des progrès ont été enregistrés en matière d’amélioration de l’environnement opérationnel du système financier (cadre juridique et comptable), du développement du système de paiement et du marché obligataire ainsi que de la privatisation des banques, a indiqué M. Christian Durand, du département des marchés monétaires et des capitaux au sein du fonds.

Les défis qui restent à relever concernent, selon M. Durand, «la poursuite de la dynamisation du secteur en clarifiant notamment le rôle que l’Etat veut jouer, et en instaurant une concurrence pure et parfaite entre les banques publiques et privées».

Les représentants du FMI ont été peu loquaces sur la question de la spécialisation des banques, option que semble avoir choisie l’Etat, affirmant que ce dernier «doit avoir une position claire sur ce qu’il attend de ses banques et donner des instructions en conséquence».

M. Fanizza a estimé qu’il était déjà important que les «autorités économiques soient conscientes que les banques doivent être proches des activités productives». Il a en outre noté qu’il est encourageant de voir que les banques s’impliquent davantage dans la promotion du secteur privé pour qui leurs crédits ont augmenté.

Toutefois, a-t-il dit, «il faut s’assurer que la croissance de ces crédits ne s’accompagne pas de la détérioration de la qualité du crédit». M. Durand a néanmoins admis à demi-mot que «les banques publiques devraient être capables de choisir les activités dans lesquelles elles veulent investir».

Abordant d’autre part le volet du marché obligataire, M. Fanizza a noté qu’il est «beaucoup plus développé que dans d’autres pays de la région et il pourrait être le volet qui servira à dynamiser le système financier». Le FMI a même estimé que ce marché est «plus important» que le marché boursier car il peut assurer «la stabilité du marché financier», alors que le marché boursier peut être source «d’instabilité».

Pour le fonds donc c’est le développement du marché obligataire qui doit être «prioritaire». Interrogé enfin sur la position du dinar par rapport aux fluctuations des devises américaine et européenne, M. Fanizza a estimé que «le dinar reste à un niveau d’équilibre cohérent avec la stabilité du pays».

A ce titre, «l’approche flexible empruntée par la Banque d’Algérie» est judicieuse. S. B.