Les causes du stress hydrique

Le précieux liquide manque dans plusieurs wilayas

Les causes du stress hydrique

Liberté, 4 septembre 2017

L’Algérie dispose de 75 barrages hydrauliques, auxquels s’ajoutent 11 stations de dessalement d’eau de mer, en sus des 180 stations d’épuration des eaux usées.

“De grâce, ne me dites surtout pas que tout va bien, notamment dans les zones rurales et certaines agglomérations secondaires où des rattrapages doivent être opérés. Je constate quotidiennement les mécontentements de la population à travers les rapports qui me parviennent et les colonnes de la presse nationale.”
Cette déclaration, émanant du ministre des Ressources en eau, Hocine Necib, résume la situation catastrophique dans laquelle se trouve un secteur aussi névralgique que celui de l’eau. En s’adressant, en juillet dernier, aux directeurs des ressources en eau (DRE) et aux directeurs des unités de l’Algérienne des eaux (ADE) à propos des perturbations dans le fonctionnement du service public de l’eau potable durant cette saison estivale, M. Necib avait mis le doigt sur la plaie, reconnaissant de facto l’échec de la politique de gestion de ce secteur qui fait face à une crise multidimensionnelle, ponctuée par un manque criant en pluviométrie pour un pays semi-aride comme l’Algérie. Et si le stress hydrique vient frapper, encore une fois, le pays, notamment certaines wilayas comme Tizi Ouzou,
Khenchela, Tébessa, Sétif, Béjaïa, Annaba, Bouira, Skikda et Souk-Ahras, c’est parce que plusieurs facteurs majeurs se sont greffés à la mauvaise gestion pour aggraver la situation.
Sinon, comment expliquer que 75 barrages hydrauliques, soit un volume global de 8 milliards de mètres cubes, auxquels s’ajoutent 11 stations de dessalement d’eau de mer pompant 2 millions de mètres cubes/jour, en sus des 180 stations d’épuration des eaux usées (Step), n’arrivent pas à répondre aux besoins en eau des 48 wilayas ? Au premier niveau de réponse, il faudra relever que le taux de déperdition de l’eau avoisine 40%, soit près de 3 milliards de mètres cubes d’eau qui s’évapore dans la nature. Au second niveau, il faut noter que le dessalement d’eau de mer ne représente que 15% de la ressource, sachant que le pays ne produit annuellement que 3,3 milliards de mètres cubes, dont le tiers provient des barrages et des eaux souterraines. Au troisième niveau, les responsables locaux n’ont jamais établi un véritable état des lieux, ce qui permettrait, au préalable, de prendre des mesures préventives en amont pour faire face à cette crise qui risque de s’aggraver.
En effet, les grandes perturbations enregistrées sont essentiellement dues à l’insuffisance de la ressource, la vétusté des réseaux de distribution, les coupures intempestives dans l’alimentation en énergie électrique — ce qui influe négativement d’une manière directe sur les stations de pompage —, les branchements illicites et les défaillances dans la gestion où les prestations sont assurées par des régies communales.
À titre illustratif, l’Algérie a enregistré plus de 80 000 fuites d’eau de janvier à fin mai dernier, dont 64 962 réparées et le reste en cours de réhabilitation, soit un volume de 7,4 millions de mètres cubes d’eau récupérés. À cela s’ajoute 6 059 branchements illicites, dont 2 606 cas ont été introduits en justice. Mais pas seulement !
L’incivisme qui prévaut dans nos cités, nos villages et nos quartiers renseignent également sur l’échec de la politique préventive lancée par les pouvoirs publics à coup de milliards de centimes pour préserver l’or bleu et adopter un comportement à même de juguler son gaspillage.
Sur le même registre, et selon des données récentes fournies par l’Algérienne des eaux (ADE), le montant des factures impayées s’élève à 46 milliards de dinars, dont 29 milliards de dinars (63%)
de factures non honorées par les ménages et 13 autres milliards de dinars de factures impayées par les administrations et les collectivités locales. Une situation financière qui affecte sérieusement le bon fonctionnement d’un secteur décidément mal en point.

FARID BELGACEM