Les sociétés étrangères ne sont pas tenues de céder 30% aux Algériens

Les sociétés étrangères ne sont pas tenues de céder 30% aux Algériens

Un grand bémol au «nationalisme économique»

par M. Saâdoune, Le Quotidien d’Oran, 28 avril 2009

C’est de Washington, en marge de la réunion du printemps du FMI et de la Banque mondiale, que le ministre algérien des Finances, Karim Djoudi, a apporté cette précision de taille.

Evoquant le dispositif de régulation du commerce extérieur, dans un entretien accordé à l’envoyée spéciale de l’APS, le ministre a indiqué que les sociétés étrangères nouvellement créées étaient tenues de réserver 30% de leur capital à un partenaire algérien, en précisant que cette instruction n’a pas d’effet rétroactif pour les sociétés créées antérieurement. La précision est de taille et elle était attendue par les 1.600 sociétés étrangères déjà établies.

L’annonce de Karim Djoudi réduit en définitive de manière considérable la portée d’une mesure annoncée le 5 février dernier. C’est tout simplement un recul, puisque traduite en règlement par le ministère du Commerce, l’instruction d’Ouyahia prévoyait un effet rétroactif. Toute société étrangère « déjà immatriculée et exerçant dans l’activité des importations est tenue de se mettre en conformité avec la disposition sus-évoquée dans un délai qui ne saurait excéder le 30 septembre 2009 ».

Recul

Des responsables du département de Hachemi Djaâboub, cités par l’APS, notaient le 5 février dernier que ces nouvelles dispositions vont « s’appliquer à l’ensemble des entreprises étrangères installées en Algérie qui activent dans l’importation des matières premières, des produits destinés à la revente en l’état et d’autres marchandises ».

C’est donc bien un recul dans ce qui était considéré comme l’une des mesures phares du nouveau « nationalisme économique » et d’une volonté de brider la facture des importations qui évolue autour de 40 milliards de dollars.

A l’évidence, les sociétés commerciales déjà installées bénéficient des avantages acquis protégés par les engagements internationaux de l’Algérie, dont l’accord d’association avec l’Union européenne. Beaucoup se demandaient en effet comment le gouvernement comptait agir pour faire accepter cet effet rétroactif. La question semble donc réglée. Karim Djoudi le signifie désormais clairement : les 1.600 sociétés commerciales installées en Algérie n’ont donc pas besoin d’ouvrir 30% de leur capital aux Algériens. Il y aura sans doute moins de nouvelles sociétés commerciales étrangères qui s’installeront en Algérie, mais celles qui sont déjà présentes – 1.600 sur un total de 24.726 recensées officiellement – sont confortées. Et si elles ne sont pas nombreuses relativement, elles pèseraient, en terme de volume, un cinquième du chiffre d’affaires dans le secteur des importations. En définitive, ce qui reste des dispositifs annoncés en février dernier pour « cadrer » les importations, c’est le nouvel identifiant fiscal (NIF) qui a permis d’assainir le fichier et d’éliminer les fraudeurs, l’interdiction d’importer les médicaments déjà produits en Algérie et les taxes de 15% introduites sur les transferts des revenus et dividendes.

Une gestion «tranquille» des réserves de change

Le ministre des Finances a par ailleurs défendu le choix du placement des réserves de change, malgré la baisse continue des rendements des bons du Trésor américain. Le choix délibéré de l’Algérie est d’éliminer le risque, et ce même avec une minimisation du rendement de ces titres de créances. Les réserves de change sont les «joyaux de la République» et « nous n’avons pas le droit de prendre des risques sur ces réserves. Pour l’Algérie, l’enjeu est de préserver et de sécuriser ses ressources en devises, même s’il y a une baisse de la rémunération, et de ne pas aller vers les actifs à risques. C’est donc un choix de prudence et il est sans doute le moins risqué actuellement. Il reste que ces placements réputés les plus sûrs, compte tenu de la dimension de l’économie américaine, ne risquent pas de pâtir seulement de la baisse des taux. En cas de roulis sur le dollar pour cause d’inflation, la valeur des ces bons de trésor par rapport aux autres monnaies risque d’en prendre également un coup. Le choix « tranquille » de l’Algérie correspond aussi peut-être au fait que la ressource humaine en mesure d’assurer une gestion active et dynamique des réserves de change n’est pas disponible. Ou ne l’est plus…